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  • Une fabrique soviétique de PQ

     

    Theatrum mundi.jpg

     

    Les Hollandais avaient dit : Non.

    Les Français avaient dit : Non.

     

    – Rien à foutre, avait répondu l’Union Européenne.

    L’UE.

    Qu’on devrait appeler l’USEE.

    L’Usée.

    L’Union Soviétique Economique Européenne.

     

    Et elle a refourgué sa camelote sous un autre nom.

    Et maintenant…

    Les Irlandais ont dit : Non.

     

    Non.

    Mais Non, en politique, ça ne diffère guère de Oui.

    Selon le principe du nihilisme.

     

    Alors voilà.

    Les peuples disent Non.

    Si l’Angleterre faisait un référendum, ce serait Non.

    Si l’Italie faisait un référendum, ce serait Non.

    Si les Vingt-Sept faisaient vingt-sept référendums, il y aurait au moins vingt Non. Allez, soyons très pessimiste, dix-sept.

     

    Bureaucrates et pipolitiques n’ont pas l’air de comprendre que leur merdier bureaucratique, les gens, les vrais gens, tout simplement, ils n’en veulent pas.

    Ils ne s’en foutent pas, non.

    C’est bien plus clair :

    Ils n’en veulent pas.

    Vraiment pas.

    Mais alors pas.

     

    Et maintenant, je vais vous dire à quoi servent réellement les constitutions européennes.

    Quand par voie référendaire, les peuples s’en mêlent, elles servent de torche-cul à leurs représentants.

    Il faut dire que ces représentants, en bureaucrates avisés, pensent que la démocratie est le moyen politique qui permet de chier sur la gueule du peuple.

    Et comme ce dernier est serviable, lorsqu’on le sollicite, il tend à ses représentants, pour qu’ils se puissent torcher, pour qu’ils soient propres en somme, le soviétique papier que ceux-ci avaient préalablement préparé…

    Ce que c’est que l’amour, tout de même.

     

    Donc :

    On considérera le référendum comme antidémocratique.

    Et comme les gens sont cons, ils ne vireront pas leurs représentants, ceux-là même qui leur chient sans modération sur la gueule.

    Et l’on recommencera la bureaucratie soviétique européenne.

    Au nom de la démocratie.

    Et des autres saloperies du Bien.

     

    Giscard d’Intestaing, qui a partagé pourtant avec son camarade Chirac, n’a pas encore fini de se torcher avec les nombreux exemplaires de son papelard inepte, que déjà les Irlandais viennent de retourner à Sarkozy (alias Mickey Grenelle, PDG du Bronzeculand-France, comme quoi tout se tient) les exemplaires de son papelard à lui.

     

    – Merde. Ça risque de retarder l’entrée de la Turquie, a glapi désolée la fadasse du Medef.

     

    Mais non, mais non.

    Même pas.

  • Le Commandement de la Machine (3)

    Le Commandement de la Machine (1)

    Le Commandement de la Machine (2)

     

     

    ***

     

    Troisième série de coupes :

     

    301. Mais dans le nihilisme impérial ne demeure plus d’histoire, plus d’espace ni de temps, plus de société fondée sur un conflit réel ou mimétique, plus de classes et plus d’hommes, finalement. Pauvres et riches sont confits dans la même misère. Tout est égalisé, tout est égal. Ils travaillent pour l’autocratie de la technique, bienvenue les gars.

     

    711. Le Commandement de l’Amour, dans sa formulation christique, est impossible à l’homme. Il est exactement prévu pour cela. Il n’y a rien à dire, c’est d’une balistique impeccable, parfaite. Le plérôme réalisé in absentia.

     

     

     

    (A suivre...)

  • Interview NDE (1)

    Je livre ici, en deux fois, une saynète d’interview retranchée (à mon grand regret) de la version définitive de Wonderland. Le nom de la chaîne télé est NDE 1 (Near Death Experience One). L’Inconnue est certainement connecté à un détecteur de mensonges, etc.

    Ange mort. E de Morgan.jpg

    Studio de télé. Logo NDE 1.Lumières vives, rose fluo. Et une arme, aussi, au bon moment.

    Sur le divan hi-tech, l’Inconnue lentement s’éveille – semble-t-il ; la Mort est là déjà, très en beauté…

     

    LA MORT. – Elle dort. Elle dort et ne sait pas encore que son visage, nous le lui avons refait à neuf et rajeuni pour la compétition. Je soufflerai sur sa face et elle s’éveillera, attention, 1, 2, 3.

     

    *

     

    L’INCONNUE – Qu’est-ce que je fais ici ?

     

    Atroce feulement numérique.

     

    LA MORT – Taisez-vous. Contentez-vous de répondre aux questions.

    L’INCONNUE – C’est un interrogatoire.

     

    Atroce feulement numérique.

     

    LA MORT – Taisez-vous. C’est un débat télévisé.

    L’INCONNUE – Cauchemar.

     

    Atroce feulement numérique.

     

    LA MORT – Taisez-vous, merde.

    L’INCONNUE – Laissez-moi sortir.

    LA MORT – Nous avons fouillé votre passé. Nous n’avons rien trouvé. De quoi vous souvenez-vous ?

    L’INCONNUE – Pardon ?

    LA MORT – De quoi vous souvenez-vous ?

    L’INCONNUE – Mais… à propos de quoi ?

    LA MORT – De quoi vous vous souvenez, putain de merde. Listez vos saloperies de souvenirs par ordre chronologique, ils seront soumis à vérification.

    L’INCONNUE – C’est débile.

    LA MORT – Et alors ? Je ne vous demande pas ce que vous en pensez. Listez. Listez. Un souvenir. Même un seul, tout petit, paumé dans un coin.

    L’INCONNUE – Ouais. La gare, le lundi, c’est à la gare que je viens, un lundi, c’est le lundi que j’arrive à la gare, je vais au travail, à Wonderland.

    LA MORT – Quel jour quittiez-vous votre travail ?

    L’INCONNUE – Quittiez ?

    LA MORT – Quittez. Quel jour quittez-vous votre travail ?

    L’INCONNUE – Le samedi. Le vendredi. Je ne sais pas. Peut-être le jeudi.

    LA MORT – C’est à la gare ?

    L’INCONNUE – Oui.

    LA MORT – Vous reprenez le train, c’est bien ça ?

    L’INCONNUE – Oui, c’est ça, c’est pourtant logique. Je ne vois pas pourquoi toutes ces questions.

    LA MORT – Alors, comment pouvez-vous me dire que c’est un lundi, pas un jeudi, votre souvenir ?

    L’INCONNUE – C’est un lundi. Sûrement. Je me vois descendre d’un train. Du train.

    LA MORT – Comment peut-on se voir descendre d’un train ? Quand on descend d’un train, on ne s’en voit pas descendre. Vous mentez.

    L’INCONNUE – Non, non, je ne crois pas.

    LA MORT – Bon. Et que se passe-t-il à la gare ?

    L’INCONNUE – Je descends du train.

    LA MORT – Ne vous répétez pas. Cherchez. Ca n’a pas d’intérêt, ce souvenir, s’il est juste ce souvenir. Cherchez. Que se passe-t-il à la gare ? 

    L’INCONNUE – C’est un lundi, je descends du train… et après… eh bien, après, je ne sais plus.

    LA MORT – Vous ne savez plus ? Plus du tout ?

    L’INCONNUE – Non. Du tout. Je ne sais rien. Je suis vidée. Et vide.

    LA MORT – C’est maigre. Un autre souvenir ? Un homme, par exemple.

    L’INCONNUE – Un homme ? Vous voulez dire un homme en particulier ? Non, non, je ne vois pas.

    LA MORT – Pourtant vous avez des enfants.

    L’INCONNUE – On me les a offerts.

    LA MORT – Qui donc ? Un homme, justement, j’imagine.

    L’INCONNUE – Non, non, je ne crois pas. A un moment, ils étaient là, c’est tout. Je ne vois que ça.

    LA MORT – Le nom de vos enfants ?

    L’INCONNUE – Bégonia. Docile.

    LA MORT – C’est un souvenir, ça. Deux filles, donc ?

    L’INCONNUE – Peut-être. A moins qu’il n’y ait un garçon.

    LA MORT – Quels âges ont-ils ?

    L’INCONNUE – Je ne sais pas. Il y a longtemps, je trouve, que je les ais.

    LA MORT – Mais enfin, vous les aimez ?

    L’INCONNUE – Je ne comprends pas.

    LA MORT – Vous leur donnez à manger ?

    L’INCONNUE – Evidemment. C’est con comme question. Je suis leur mère.

    LA MORT – Gardez vos commentaires pour vous. Vous leur donnez à boire aussi, et des vêtements, et ce genre de choses ?

    L’INCONNUE – Oui, oui.

    LA MORT – Alors vous les aimez.

    L’INCONNUE – Même qu’ils vident tout mon compte en banque. Ils pillent même les dettes.

    LA MORT – Les chéris…

    L’INCONNUE – Les petits enculés, oui…

    LA MORT – En somme, vous êtes heureuse ?

    L’INCONNUE – Heureuse ?

    LA MORT – Oui, vous travaillez, vous gagnez votre vie, vous avez deux enfants parfaitement adorables, vous êtes heureuse. Le bonheur, quoi.

    L’INCONNUE – Le bonheur.

    LA MORT – Et votre nom, madame, il est revenu votre nom ?

    L’INCONNUE – Quel nom ? Ah, mon nom. Non.

    LA MORT. – C’est bien, ça. Ca soulage. Quelle expérience.

    L’INCONNUE. – Mais qu’est-ce qui s’est passé ? Pourquoi je ne sais plus mon nom ?

    LA MORT – Je rappelle à nos spectateurs que vous êtes sous sérum de vérité. Et vos enfants, ils ne le connaissent pas votre nom ?

    L’INCONNUE – Je ne sais pas.

    LA MORT – Comment vous appellent-ils ?

    L’INCONNUE – Maman.

     

    Atroce feulement numérique.

     

    LA MORT – Vous mentez ! N’oubliez pas que je suis là tout spécialement pour vous aider. Comment vous appellent-ils, alors ?

    L’INCONNUE – La Vieille.

    LA MORT – Bravo. Vous vous sentez vieille, vous ?

    L’INCONNUE – Oui.

    LA MORT – Quel âge avez-vous ?

    L’INCONNUE – Eh bien… écoutez… je dirais… 65 ans…

    LA MORT – Faux. Je suis ravie de vous apprendre que, génétiquement, vous avez 34 ans.

    L’INCONNUE – Vous savez ça, vous ?

    LA MORT – Oui, je sais ça. J’en sais même plus que ça. Ce n’est pas très vieux, 34 ans. La vie va encore vous traîner un moment. Elle va vous traîner longtemps, très longtemps, oui, très longtemps, très très.

    L’INCONNUE – Ah oui. Et comment ça ? Et comment vous le sauriez ?

    LA MORT – Comment je le sais. Mais parce que vous êtes morte, ma chère.

    L’INCONNUE – Rendez-moi mon nom, maintenant. Non, je ne suis pas morte. Et vous non plus, vous ne savez pas mon nom. Pas morte encore, non. Salope. Mon nom.

    LA MORT – Je le sais. Mais je ne puis pas vous le dire. C’est tout à fait contraire au règlement.

    L’INCONNUE – Cette discussion est atroce.

    LA MORT – Fermez-la.

    L’INCONNUE – Je ne suis pas morte.

    LA MORT – Si. Vous êtes morte. Essayez donc de vous tuer.

    L’INCONNUE – Quoi ?

    LA MORT – Essayez donc de vous tuer.

    L’INCONNUE – On passe encore à la télé, là ?

    LA MORT – Oui. L’audimat monte à max.

    L’INCONNUE – C’est de la folie.

    LA MORT – Si vous ne croyez pas que vous êtes morte, essayez donc de vous tuer. Pour voir.

    L’INCONNUE – Pour voir ?

    LA MORT – Oui, oui, pour voir. Préférez-vous que je vous tue ?

    L’INCONNUE – Non. Non.

    LA MORT – Alors, allez-y.

    L’INCONNUE – Bon. Pourquoi pas, après tout ?

    LA MORT – Adieu Bégonia, adieu Docile.

    L’INCONNUE – Quoi ?

    LA MORT – C’est ce que vous devriez dire. Adieu Bégonia, adieu Docile.

    L’INCONNUE – Adieu Bégonia, adieu Docile.

     

    L’Inconnue se tire une balle dans la tête.

     

    (A suivre…)

  • Mafia, tourisme et conséquences...

    Mad max.jpg

     

     

    Personne ne dit plus rien. D’ailleurs, n’importe quoi vaut n’importe quoi.

    La peur des conséquences, dans un milieu où la consanguinité, de moins en moins métaphoriquement d’ailleurs, exhibe ses tarés, paralyse toute parole ; ou du moins la replie sur l’espace privé falsifié, conversations de café, bruits de couloirs, rumeurs invérifiables et donc également inattaquables. Le tout bien planqué derrière les discours d’apparat, généreux, solidaires, sociaux et sociétaux, transparents ! En public, on cire des imbéciles en grandes pompes, et les fréquents éloges journalistiques de trous-du-cul grand-dilatés ont cet avant-goût délicieux des oraisons funèbres. C’est tout un petit monde qui aspire à être jeune-mort de son vivant. Je dis jeune-mort, parce que les autres, qui ont six mois de décomposition à leur actif et sont vieux-morts, eh bien, le monde qui tourne toujours plus vite les a déjà oubliés, non sans raison. Les mafieux sont philanthropes, et ça se vend bien. C’est un milieu d’avant-garde qui a au mieux une journée d’avance sur ses imitateurs ; plus souvent, une heure ; quelquefois même du retard – lorsqu’un autre ahuri satisfait se met à hurler au plagiat.

    La peur capitalise et fabrique du pouvoir, et encore de la peur. Réputations et cotations ont supplanté travail et talent, puisqu’ils ne s’achètent pas. C’est cela, ou bien l’anonymat glorieux, le pseudonymat héroïque, ah les beaux blogues ! Le courage à l’abri de la lâcheté, en somme. Des touristes ! La peur, la peur, vous dis-je. Vous voyez bien qu’il n’y a toujours personne. Des mafieux et des touristes. Les mêmes, selon les heures, aussi...

    Formule. Les conséquences de ce que j’écris ne sont pas ce que j’écris. Elles n’ont même généralement rien à voir avec. Vraie ou fausse, l’incompréhension est un gouffre.

    Je n’ai rien à foutre des conséquences.

    – Mais la loi ?

    – La loi demande un effort. Pas seulement dans la formulation, d’ailleurs.

    – Un exemple ?

    – Je ne nomme personne dans ce billet.

    Quel effort.

  • Dissident, il va sans dire, de Michel Vinaver

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    Pas mal. Mais pas terrible.

     

    La mère et le fils, qui vivent ensemble. Et hors champ, le père absent, divorcé, patron de gauche (eh oui, déjà : la pièce est de 1976). Le fils qui cherche, mollement, du travail, en trouve, ne le garde pas ; la mère qui perd le sien, informatisation oblige. Et le père qui paie. Chômage et drogue. Conformisme, mensonge, et vague dissidence politique… Un monde qui enfonce…

     

    L’époque est plutôt bien saisie.

     

    Mais le théâtre à deux personnages tend toujours, d’une façon ou d’une autre, à sortir du théâtre, tout simplement parce que la situation se répète et s’étire, et conséquemment n’est jamais réellement renouvelée ; et parce que l’ennui, sans vaincre totalement, pénètre un intérêt qui, à mesure, devient faible et diffus.

    Ce doit être un trait bien contemporain du théâtre français : comment peut-on mettre autant d’intelligence, de finesse, de sensibilité et de subtilité à écrire une pièce qui, sans être tout à fait ratée, ne passionne pas (moi, du moins) précisément parce qu’elle est intelligente, fine, sensible et subtile.

    Cela manque de cruauté. Et de bêtise. Et donc, de comédie. Et de théâtre. Et en effet, s’il n’y a pas là matière à tragédie, pourquoi ne pas donner tout de suite dans la comédie ? J’imagine ce que le génie de Feydeau eût fait d’une situation comme celle-ci.

     

    Et je ne comprends toujours pas l’intérêt stylistique, dramatique, dramaturgique de dé-ponctuer la langue française. Phénomène de mode, qui sait ? Les justifications « théoriques » risquent donc d’être légion.