Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Theatrum Mundi - Page 140

  • Poubellication maison

    655355309.jpg

     

    – Et maintenant ?

    – Maintenant, j’ai l’air con.

     

    C’est ce que je me suis dit en voyant la ramette posée sur le bureau.

    500 pages écrites. Et serrées.

    Tout faut.

    10 textes.

    Textes de théâtre et sortes d’essais – je ne suis pas un essayiste sérieux, il faut toujours que ça tire vers le pamphlet, la violence…

    Ecrits entre 2005 et 2007.

    Très précisément commencé le 25 décembre 2004 par l’envoi à la poubelle numérique de la bécane d’un texte intitulé Le Commandement de la machine, lui-même écrit de 2002 à 2004.

    – C’est trop gros.

    Coupons.

    Je résume. Parce que, concrètement, ça prend du temps.

    Il faut se décider.

    De ces textes, seuls cinq demeurent.

    Les autres ont dégagé.

    La pièce la plus faible (selon moi), quoique peut-être une bonne idée, Spéculations, perspectives, cauchemar a rejoint Le Commandement de la machine. Poubelle.

    D’autres seront peut-être débitées par morceaux sur ce blog. C’est également une poubelle. D’un sens. Mais pas seulement.

    J’ai conservé par devers-moi, sentimentalisme ? le plus gros morceau, inachevé d’ailleurs, intitulé Catacombes dans la cuisine. A reprendre entièrement. Et à augmenter. Certainement en septembre 2008.

    Restent cinq pièces, retravaillées.

    Du dialogue. Que du dialogue.

    Des dialogues.

    Ces pièces font un roman.

    Par défaut.

    250 pages. Serrées.

    Voilà.

    Champagne.

     

     

     

    Sommaire*

     

    I. Dans les Provinces de l’Ennui

    II. Absolute Wonderland.

    III. Pour une Culutre citoyenne !

    IV. Territoires de la merde

    V. Ce que j’ai fait quand j’ai compris que j’étais un morceau de machine ne sauvera pas le monde

     

     

     

     

     

    (*) Je modifie en fonction de ce nouveau sommaire la numérotation des extraits de Tout faut présentés sur Theatrum Mundi auxquels il est possible d’accéder par la colonne de droite.

  • Du le style

    474756372.jpg

     

    Du le style.

    Beau titre (je le dis).

    On me demandera pourquoi ?

    Parce que rien à foutre le style.

    J’aime pourtant le français.

    Et même le fameux style classique français, je l’aime.

    Belle marquise…

    Et Bossuet, ah, Bossuet !

    Le style est une arme.

    (Les armes – les vraies – me fascinent.

    Comme aussi les instruments de musique, je m’en aperçois à l’instant.

    Mais je n’utilise jamais ni arme ni instrument de musique et il vaut mieux.)

    Je continue.

    Il y a une de ces histoires, en France, avec le style.

    Il y a un mythe du style et ce mythe sert à muséifier la littérature.

    Un écrivain a du style, un style, n’a pas le style.

    C’est indéfini ou partitif.

    Mais tout de même, tout de même, il y a le style. The style.

    Le style absolu français.

    Qui plane au-dessus de tout.

    Que rien ne satisfait.

    Que personne ne connaît.

    Un mystère.

    Mais qui permet de ranger tout ça au musée.

    Au mausolée, quand on ne peut pas faire autrement.

    Qui permet que toute littérature, ici, soit échec.

    Tout.

    C’est un putain d’embaumeur, le style français.

    Balzac, il écrit pas toujours super, hein?

    L’art et la littérature finissent au musée.

    C’est une manie. Ça et le Panthéon. Et puis Napoléon.

    Ça rassure, les musées. Il ne s’y passe rien, des touristes défilent.

    Il n’y a rien à voir, dans le musée.

    Ou seulement de jolies touristes – et puis quoi, hein ?

    Même Dostoïevski, s’il avait écrit en français, on aurait trouvé à lui redire dans le style.

    Faut voir ce qu’on a longtemps balancé à Shakspeare.

    Oui, Shakespeare, je sais. Mais c’est une orthographe que lui-même n’a jamais employée.

    Pas du tout français, Shakspear.

    Shkspr.

    Les armes. J’y reviens. Bon.

    Les instruments de musique.

    Tout dépend de ce que vous voulez exécuter.

    Exécuter, oui.

    C’est un problème d’adéquation.

    J’ai vu des snipers prétendus bien encombrés d’épées lourdes.

    Et des agents secrets qui ne savaient pas conduire leur char d’assaut.

    Et Philippe Sollers qui écrit, Dieu sait pourquoi, avec une raquette de tennis.

    Des trucs mal adaptés partout. Tout le temps.

    Remarquez, c’est assez drôle.

    Et je vous passe les écrivains sans alphabet.

    Les flopées de dramaturges kamikazes, sans aucun équipement d’aucune sorte, qui se fracassent leurs os contre les murs d’une forteresse dont les portes sont grandes ouvertes.

    J’ai même entendu la mort de Siegfried à la flûte de Pan, un jour, dans le métro (mais j’étais fatigué, sans doute).

    Et les fous de la Grammaire, de la Syntaxe et en général… du Style.

    Et ceux qui n’y connaissent rien, qui n’y entendent rien, et qui espèrent bien le faire savoir et respecter, d’autor.

    La perfection m’emmerde, et l’ignorance itou.

    La lenteur et la vitesse.

    La structure et l’improvisation.

    Je m’en bats les couilles.

    Ohé.

    Qu’est-ce que vous racontez, les écrivains français ?

    Tout le monde s’en fout.

    Heureusement que vous êtes bien au chaud entre vous, à Paris, ville sous cloche, future Ilion.

    A écrire des trucs déjà morts, taxidermistes ! Empailleurs !

    Ils se bourrent le cul avec de la paille, la caboche aussi est pleine de bourre, et les voilà qui se prennent pour la statue du Commandeur (avec des ennemis, même, des fois)…

    Des scènes inénarrables, ça donne !

    La Statue du Commandeur chez le psychanalyste lacanien du XIV°, la Statue du Commandeur raconte son enfance avec un papa pas gentil (voyez la nuance), la Statue du Commandeur fait un voyage dans un pays lointain et c’est quand même formidable, la Statue du Commandeur évite héroïquement d’être un touriste en assortissant son parcours Découverte de la Thaïlande de remarques iconoclastes (sic) sur les jeunes femmes indigènes, etc. La Statue du Commandeur sous ecstasy. La Statue du Commandeur fume comme Michel Houellebecq. La Statue du Commandeur lit Debord et Heidegger et se trouve par exception être la seule à tout piger ce qu’elle veut là-dedans (d’ailleurs, elle le savait déjà).

    La Statue du Commandeur dans son propre rôle.

    La Statue du Commandeur dernier écrivain, dernier tout.

    Dernier tube.

    (Petite annonce : je revends ces volumes, et pas cher.)

    Ah, mais le style, hein, le style.

    La dernière fois que j’ai lu un grand roman français, si je suis autorisé à le dire, c’était les Bienveillantes.

    Mais l’auteur était aussi américain qu’inconnu à Paris. Jonathan Littell.

    Avait-il le droit d’écrire ça ? (Qu’est-ce que c’est que ce guignol qui ne raconte pas sa vie ?)

    Avait-il le droit d’écrire ça comme ça ? Avec un narrateur SS (j’ai même entendu une ordure radiophonique bien de chez nous refuser de distinguer l’auteur du narrateur) cultivé et homosessuel (alors qu’on le sait que la cultivation et l’homotextualité, c’est par principe vachement le top, merde) qui nous racontait sa vie à lui, la Shoah de l’Ukraine à Auschwitz, le meurtre de sa mère, Stalingrad, la déroute allemande, les bombardements de Berlin, la fuite finale hors d'Allemagne… Et dans tous les détails et jusqu'aux plus atroces (nous, les détails, on les emmerde, on est vachement au-dessus de tout ça, la preuve, c’est que le diable est dans les détails…). Mais alors, justement, les détails.

    Ça faisait donc bien des problèmes, m’a-t-on dit (et pas qu’à moi), avec le du le style.

    D’autant qu’il en a vendu plein (même qu’il a piqué la place à Josette A. qu’elle était réservée, les histoires, les histoires...).

    Un vrai choc, malgré le du le style des cons.

    Même que je ne savais que lire ensuite.

    Alors j’ai relu tout Eschyle. Dans l’ordre.

    Jusqu’à l’Orestie.

    Tout Eschyle.

     

     

     

     

     

    Sur le même sujet : Guérilla.

     

  • Le miroir brisé, de Pierre Vidal-Naquet

     

    456819556.gif

     

     

    Ceux qui prennent des décisions dans la tragédie, souvent pour le pire, rarement pour le meilleur, ce sont les héros.

     

    Le grand historien Pierre Vidal-Naquet ne cherche pas seulement, dans ce tout petit livre passionnant, issu d’une conférence ultérieurement développée, à lire le théâtre grec antique à la lumière de la connaissance historique, il cherche également à comprendre la politique athénienne par le théâtre de ses tragiques – et du grand Aristophane.

    Mais la tragédie athénienne est un miroir brisé.

    Elle ne donne pas prise, ou bien peu, à ce que nous appelons la politique.

    D’abord parce que peu d’évènements contemporains sont représentés. Les histoires sont celles encore des épopées homériques, de la guerre de Troie, etc.

    Sur les trente-trois drames athéniens, quatre seulement sont censés se dérouler partiellement ou totalement sur le sol attique, quatre  autres concernent «  le jugement d’un étranger (Oreste) ou l’accueil d’un groupe d’étrangers menacé par ses concitoyens et suppliant Athènes de le recevoir. »

    Si nous prenons l’ensemble du corpus, on constate qu’il n’est pas un seul drame où l’opposition entre Grecs et Barbares ou entres citoyens et étrangers ne joue pas un rôle significatif. J’ai demandé à un ordinateur si le mot xénos ou les mots de sa famille étaient présents ou absents dans le corpus tragique. La réponse a été qu’il était présent partout… sauf dans les Perses où, bien sûr, le mot barbaros est abondamment représenté.

    Le livre se conclut ainsi :

    Quand Napoléon rencontra Goethe, il lui dit, selon la tradition : « Aujourd’hui, Monsieur, la tragédie, c’est la politique. » Chez les Athéniens, c’était une affaire beaucoup plus compliquée.

     

    Pas moyen donc, par leurs œuvres, de savoir ce que pensaient les tragiques de la politique démocratique de leur temps.

    Voici pour Eschyle :

    Chacun est d’accord pour dire que le jugement final de l’Orestie, le jugement et l’acquittement d’Oreste, grâce à l’ultime intervention d’Athéna, font référence, en 458, à l’importante réforme d’Ephialte, en 462, qui mit un terme au rôle de l’Aréopage comme Conseil de gardiens des Lois, limitant ses fonctions à celles de Tribunal chargé des crimes de sang, tandis que la Boulè, tirée au sort, devenait, aux côtés de l’Ekklésia – l’assemblée populaire –, le seul organe délibératif ayant une fonction politique. Chacun admet aussi qu’il s’agissait d’une réforme profondément démocratique, qui suscita assez de troubles pour que son instigateur, Ephialte, soit assassiné l’année suivante, laissant ainsi la place de leader du parti démocratique à Périclès.

    Cela dit, pouvons-nous passer de la lecture des Euménides à une information sur l’attitude personnelle d’Eschyle ? En d’autres termes, pouvons-nous deviner, grâce au texte des Euménides, comment Eschyle vota, s’il vota, lors de la session de l’Ekklésia qui entérina la réforme d’Ephialte ? Il est frappant de constater que les interprètes se divisent en deux camps. Les uns admettent qu’Eschyle est un partisan de la Réforme – tel est le cas, par exemple, de Paul Mazon ; les autres estiment au contraire qu’Eschyle était un laudator temporis acti, un partisan de la tradition.   

     

    Quant à  Sophocle, le seul des trois grands tragiques à avoir fait « ce que nous appellerions aujourd’hui une carrière politique. Elu stratège, il prit part aux côtés de Périclès à la répression de l’insurrection de Samos », voilà ce que dit de lui son contemporain Ion de Chios : « En matière politique, il n’était ni habile ni particulièrement pénétrant, il était comme un quelconque athénien de qualité ». Et Vidal-Naquet de conclure  :

    Quelque chose de ce cursus passe-t-il dans son œuvre tragique ? A mon grand regret, je dois répondre que non, ou si peu.

    Et plus loin :

    Décidément, à quelque niveau qu’on se situe, la tragédie de Sophocle n’est pas la tragédie politique d’Athènes. Cette tragédie-là, c’est Thucydide qui l’a décrite, non Sophocle. Eschyle a dépeint la bataille de Salamine. Sa description, antérieure de plusieurs décennies à celle d’Hérodote, reste notre source historique principale, même si Eschyle n’a pas composé sa narration à notre intention, mais à celle des spectateurs de 472. Euripide reporter et auteur tragique a multiplié les allusions, même si on lui en a prêté trop et si la distanciation ne lui était pas étrangère. Il y a chez Sophocle une hauteur de ton qui rend pratiquement impossible toute interprétation actualisante.

     

     

    Ce qui n’entraîne pas que Vidal-Naquet mésestime les adaptations postérieures.

    Il revient même plusieurs fois sur l’Antigone d’Anouilh et voit dans les reprises successives de  l’histoire d’Antigone – par Hölderlin, par Brecht s’appuyant sur Hölderlin, par Anouilh aussi… – celle qu’on peut faire de la conscience européenne.

     

    *

     

    Le théâtre n’est sans doute pas la chose gentillette pour laquelle notre époque a intérêt à le faire passer.

    J’ai conservé pour la fin ces quelques phrases, celles sans doute qui m’ont le plus marqué :

     

    Oserais-je le dire ? Ce qui à mes yeux fait écho à la tragédie athénienne, n’est pas telle ou telle pièce de théâtre, mais bien cette série de représentations politiques à l’usage des masses que furent les procès de Moscou dans les années 1936-1938 ou de Budapest, Sofia et Prague, sans oublier Tirana, à la fin des années 40 et au début des années 50.

    La différence est évidente. Ces procès se terminent par une balle dans la nuque ou une corde autour du cou. Mais où est la ressemblance ? Il s’agit de grands personnages de l’Etat que l’on montre au peuple et que l’on brise. La dimension théâtrale est manifeste. Chaque acteur, accusé, procureur, président, avocat, joue un rôle qu’il a appris par cœur au cours des semaines ou des mois qui précèdent. Si un acteur s’écarte de son texte, comme cela arriva à Sofia au procès de T. Kostov, c’est toute la représentation qui est mise en question. Quand le rideau tombe, le héros est bon pour la mort. Sommes-nous vraiment si loin de la tragédie athénienne ou de celle de Shakespeare ?

  • Mettre les voiles, Alina

    1745341993.jpg

     

    On n’a pas si souvent l’occasion de rigoler, comme dit l’autre. D’autant que l’humour s’effondre avec le reste, principalement avec la langue française. Mais quand même. Il reste les catholiques. Enfin, certains catholiques. Lesquels, d’ailleurs, n’ont plus grand-chose de catholique. Ce sont ce que j'appelle des catatholiques. Alina Reyes, par exemple. Elle ne brille pas par son humour, la pauvre, et c’est précisément cela qui est drôle. Elle ne brille pas davantage par l’orthodoxie de son catholicisme, et en définitive, elle ne brille pas du tout, ce qui confine à l’hilarant. Si donc vous avez l’envie de rigoler, parce que, comme dit l’autre, on n’en a pas si souvent l’occasion, allez donc faire un tour sur le blog de cette légère Alina, les illuminations fusent de toutes parts, un vrai régal. Par illuminations, je veux juste dire que la dame, en fait de mystique à deux sous, est tout simplement, et comme dit ce même autre, bien allumée. Il y a son article intitulé « Je suis la foi », qui est une vraie merveille d’aberration imbécile (et, dans sa façon de gentiment balayer le Credo, d’hérésie ? – ce qui ne gênera personne) ; et surtout sa défense d’un quarteron de catholiques bien-pensants ayant adressé à Benoît XVI, depuis le charmant site Oumma.com cher à Tariq Ramadan et aux Frères musulmans, une critique bécassement neuneu pour avoir osé baptiser (alors qu’il n’est que Pape), à Pâques, un homme né musulman et qui, semble-t-il, ne goûte guère sa religion maternelle (oui, comme on dit : langue maternelle) – sans doute parce qu’il la connaît mal, lui… Ces braves gens semblent en effet dire au Saint Père, je traduis : « – Merde alors, Très Saint Père ! A quoi ça sert qu’on se beurre la raie à tours de bras, nous autres catatholiques de l’Oumma, si c’est pour que ce soit vous qui convertissiez des musulmans, et non point eux qui nous pénètrent, et soumettent, et remettent… » Un pur moment de bonheur. De bonheur catatholique. Mais si.

    Il m’était arrivé, il y a quelque temps, d’appeler – oh, par jeu… – Alina Reyes Alina Rayée. Je pense qu’Alina Voilée serait aujourd’hui bienvenu. J’ai également émis l’idée (que j’ai alors placée dans la bouche du brave Mickey Grenelle) d’une symétrie possible entre l’exhibition des chairs où l’Occident en touriste se complaît et prélasse, et l’intégralité de la disparition du corps féminin derrière des linges atroces que revendique avec une suffisante légitimité quelques allumés de l’islam intégral. – Alors que faire, Alina ? Ouvrir une boucherie catatholique-hallal au cœur des Pyrénées ?

    1240474805.jpg

     

     

     

    J’espère que Yannick Haenul, s’il a vraiment plagié Alina Voilée, va perdre son procès (si procès il y a) : parce que c’est illégal, et parce que c’est stupide ; et aussi parce que, ce faisant, il a prouvé son peu de goût.