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médias - Page 2

  • Scène perdue

     

     

     

    La gueule pleine de sang plus ou moins vrai, il parle encore :

     

     

    Vous savez ou vous ne savez pas mais la scène, c’est l’endroit où nous les morts, on est chez nous

    On a débarqué de tous les siècles depuis qu’on s’en souvient

    On est bigarrés en diable, couverts de sang et plein d’amours tordues, et les plus fieffés salopards d’entre nous, même s’ils n’ont pas vécu en vrai

    N’ont pas vécu en vain et d’ailleurs vivent encore

     

     

    Ici nous les morts on est hantés par les vivants ou prétendus vivants, ils se la jouent un peu acteurs mais ne nous survivent pas !

    Mais fondamentalement oui c’est chez nous ici, oui

    Puisque c’est le seul lieu de cette civilisation où les morts reviennent, l’ultime où ils reviennent encore !

     

     

    Et ici, nous, on vous reçoit, braves gens

    Même si pour venir vous avez besoin de croire que c’est l’inverse et que sans vous on n’existerait pas

    Alors qu’en vrai, quand vous n’êtes pas là, parce que vous croyez être vivants ailleurs, on est là quand même, nous les morts

    A tel point que s’il n’y a plus de scène jamais, eh bien, ce n’est pas grave !

    Parce que, public ou pas, acteurs ou non, gens importants ou point, nous sommes les fantômes sans quoi plus rien

    Une armée de ressuscités pas saints du tout et qui se paient le luxe de n’être jamais morts même une fois, et pour nombre de ne s’être jamais donnés la peine de naître dans ce que vous appelez la vie – mais bon, c’est normal, de votre point de vue

    Car en vérité je vous le dis, nous sommes le principe qui vous parle

    Comme a presque dit Christ qui n’est pas celui que vous croyez

    Puisque, que vous croyez croire ou que vous croyez ne pas croire, vous y croyez toujours, d’une façon ou d’une autre, et même si c’est plutôt d’une autre

    Et donc, que je vous dis, nous sommes le principe qui vous parle et le commencement de toute chose

    Parce que primo au sens le plus banal nous vous parlons et parce que secundo vous êtes parlés par nous

    Car nous, morts, avons la voix active et vous, vivants, la voix passive et c’est ainsi depuis la nuit des temps

    Et pour les siècles des siècles.

     

     

     

     

  • Les élections américaines

     

     

     

    Ce serait après tout une singulière façon de dire quelles choses revêtent une importance et quelles n’en revêtent guère, que de donner ici pour titre de chaque billet l’information principale du jour relayée par les grands médias d’information. Le corps dudit billet, quant à lui, aurait trait à ce qui m’a réellement importé dans la journée, que ce soit des choses que j’ai faites, pensées ou imaginées – et il est vrai qu’il serait très simple de donner au contenu de ce blog l’allure d’un journal. Ainsi, chaque bref récit de ma journée s’ornerait de ce qui semble important à ceux qui décident de ce qui l’est. Et parlerait de tout autre chose ; ou non : puisque ce rabâchage en définitive nous atteint, nourrit nos discussions de comptoir ou de réseau social, et, parfois, nos votes. Et finalement, il est à peu près impossible que ce rabâchage n’appartienne pas à ma vie ; mais savoir dans quelle proportion, c’est difficile. De ce jour, par exemple, je pourrais dire que j’écris ce billet pour rire, en sirotant un excellent whisky ; ou bien que ma question est de trouver un moyen d’articuler le Mahomet de Voltaire avec le Moïse de Chateaubriand et le Charles IX de Marie-Joseph Chénier, ce qui pourrait bien être au fond, ma façon dramatiquement personnelle de faire de la politique ; ou bien, tout autrement, que je ne travaillais pas, et que je suis allé longuement marcher dans la forêt et dans les vignes, qu’il faisait un beau froid sec ensoleillé et que ces reliefs d’automne rasés par le soleil étaient simplement magnifiques ; cela serait banal et juste. Pourquoi au fond se soucier de choses autres, auxquelles on ne peut rien, et dont les discussions et querelles signent seulement notre impuissance, bien réelle ? Un jour, peut-être, tout de même, en signe que ce qu’on appelle la crise est devenue bien prégnante, le titre et son contenu coïncideraient réellement. Ce serait, à ma modeste échelle, un événement (comme par exemple le jour où la mobilisation générale coïncidera avec mon incorporation, mais là, je crois que je plaisante). Ou bien le signe que les informations dispensées par les grands médias sont devenues insignifiantes et banales – ce qui approche aussi. Mais aux jours de bouleversements encore lointains, cela donnerait quelque chose comme la célèbre inscription de Kafka dans son Journal, en date du 2 août 1914 : « L’Allemagne a déclaré la guerre à la Russie. – Après-midi piscine. » Néanmoins, je dois ajouter que ces nouvelles du monde me parviennent désormais par des voies très dérivées. L’information est rarement de première main et je n’ai aucun a priori positif sur le métier de journaliste. En conséquence, je ne lis aucun journal, ne regarde pas la télévision, n’écoute pas la radio. Mais il y a internet et ses réseaux sociaux, et maintenant, ses magazines de commentaires, qui ne se cachent pas, en général, de n’avoir d’autres sources que celles des grands médias idiots. Ce qui est amusant, au fond, c’est que ces masses de commentaires étalés partout, qui permettent justement à quelqu’un comme moi d’être en gros au courant de ce dont il faut causer dans le monde, affaiblissent les médias traditionnels, qui avaient longtemps passé pour sérieux. Ces médias, de plus en plus en danger, seront donc, eux aussi, de moins en moins bien informés, vérifieront encore moins leurs sources, et finalement diront seulement ce dont ils ont besoin, en fonction de leurs intérêts propres, etc. Et les commentaires dérivés des autres guignols plus ou moins humoristiques s’éloigneront plus encore d’une réalité dont il ne sera plus jamais rendu-compte. J’ai cru comprendre qu’on appelait cet empilement de faussetés opaques du nom de transparence. Tout en bout de course, j’en participe ici, et je l’admets sans ironie. Peu importe. Il y avait donc aujourd’hui des élections aux Etats-Unis d’Amérique. Peut-être changeront-elles, insidieusement ou non, ma vie, je n’en sais rien, et à cette heure, je m’en contrefous. Je n’ai même pas le bon goût de préférer Obama à l’autre tronche de Mormon. Le sort de cette puissance, dont j’ai bien conscience que mon pays est désormais un satellite très commun, me passe au-dessus de la tête. Tout ce que cela m’inspirerait est une vague envie de cracher à la gueule de la succession d’imbéciles qui est allée mettre mon pays dans la situation d’obéir à une puissance extérieure, sinon pas à plusieurs. L’occasion, je le crains, ne m’en sera pas donnée pour autant. Ou pas tout de suite. Si elle l’était un jour, je crois que le titre du billet et son contenu coïncideraient. J’allais oublier que je n’ai pas lancé ce blog pour raconter ma vie, et que je ne généraliserais pas non plus de donner pour titre à mes billets l’information dont on nous gave. Bref, que ce qui me requiert ici ne tient en définitive ni de ce que je fais de mes journées ni de ce que titrent les médias. Alors quoi ?

      



  • Anti-journalisme

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    Les opinions portent sur tout et sur n’importe quoi, sans cesse. Il s’agit d’en avoir le moins possible et, fort de cela, de lancer la charge de la comédie à l’endroit exactement de la société de son temps où elles font rage, révélant ainsi, toutes, leur extrême ridicule, leur pathétique frôlant parfois la tragédie. Il s’agit d’être le champ de bataille, l’air que respirent les personnages et, même, à ces opinions près, tout ce qu’on peut de ces personnages ; et s’il demeure une opinion personnelle, de la fourrer dans la bouche du plus idiot d’entre ceux-là.