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Livres - Page 36

  • Délicatesse

    Il y a un épisode qui concerne la mort de Savinio. Savinio et sa femme faisaient chambre à part. Il était gravement malade, il souffrait du cœur ; aussi laissait-il la porte ouverte entre eux deux. Un matin sa femme, en se levant, trouve cette porte fermée, et derrière, Savinio, mort : il s’était levé, il était allé fermer la porte, pour que sa femme ne l’entende pas mourir.

    Leonardo Sciascia, De la Sicile et de la vie en général (Conversations avec Domenico Porzio), ed. Liana Levi

     

    Tombé là-dessus, en feuilletant ce beau livre d’entretiens, au moment où Sciascia, évoquant la vertu, passe de Sénèque à Diderot, et de Diderot à ce Savinio dont je ne connais ainsi rien d’autre que l’histoire de sa mort.

     

  • Vide au centre

    (On ne me croira peut-être pas, je m’en contrefous d’ailleurs, mais hier soir, j’étais en train de lire et relire, pour des problèmes de théâtre, Théorie de la Constitution de Carl Schmitt. J’ai fait une promenade sur internet, et je suis tombé sur ce billet, consacré à Sollers et ses sbires, de Juan Asensio, puis sur sa controverse légère avec Elisabeth Bart. Du coup, ramassant à la va-comme-je-te-pousse tout ce bazar, je me suis délassé à écrire ça. Vers trois heures du matin, ayant relu le texte, je l’ai trouvé au moins bizarre – j’avais même l’impression de parler de moi à la troisième personne du singulier, alors que non, pas vraiment. Je ne l’ai pas mis en ligne. Je le fais maintenant. La page informatique, de plus en plus, me semble un paillasson.)

     

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  • Tchekhov marmonne quelque chose qu'on ne comprend pas

    Voilà, c’est fini, ils ont vécu oisifs, dans une insouciance angoissée, ils ne sont pas adaptés au monde qui venait, elle a tout dépensé comme pour fuir, lui – son frère – a perdu le courage dans des bandes de billard, la cerisaie est vendue, à Lopakhine, un honnête gars, fils de moujik devenu commerçant, et les voilà donc à la toute fin de la pièce disant adieu à leur maison, leur monde.

     

    Lioubov Andreevna et Gaev sont restés seuls. Comme s’ils attendaient ce moment, ils se jettent dans les bras l’un de l’autre et sanglotent, tout bas, en se retenant, de crainte qu’on ne les entende.

     

    GAEV (au désespoir). – Ma sœur, ma sœur…

     

    LIOUBOV ANDREEVNA. – O ma chère, ô ma tendre, ô ma belle cerisaie !... Ma vie, ma jeunesse, mon bonheur, adieu !... Adieu !...

    Voix d’Ania (comme un appel joyeux) : « Maman !... »

    Voix de Trofimov (avec une excitation joyeuse) : « Ohé !... »

    Une dernière fois, regarder ces murs, ces fenêtres… Notre pauvre maman aimait à marcher dans cette chambre…

     

    GAEV. – Ma soeur, ma sœur..

     

    Voix d’Ania : « Maman !... »

    Voix de Trofimov : « Ohé !... »

     

    LIOUBOV ANDREENA. – On arrive !

     

    Ils sortent.

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  • Torture sympa

    Un vrai roman, même passablement mauvais, quand on le trouve aujourd’hui, est un genre d’événement positif. Tout l’agrément d’un Houellebecq, pour l’instant, tient à cela.

    Il n’est pas du tout assuré, malgré les chiffres, que la position du roman soit littérairement préférable à celle du théâtre ou de la poésie ; on pare simplement n’importe quoi de ces noms hier prestigieux. Qui, publiant un essai, se souvient de Montaigne ? C’est une culture entière, et pas seulement littéraire, qu’il s’agit de n’en pas finir d’achever.

     

    La production encore dite littéraire, essentiellement romanesque, est presque exclusivement devenue une manière de journalisme un petit peu supérieure – au moins quantitativement, si l’on tient pour première supériorité le simple fait de faire plus long –, qu’elle soit ou non le fait de journalistes patentés.

    Il est aujourd’hui presque aussi vulgaire de publier un livre que de passer à la télévision.

     

     

     

     

    (Cette petite chose écrite pourra être le début d’une plus longue.)