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tragédie - Page 2

  • A tout prix

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    Peut-être la pièce ne rencontre-t-elle la tragédie, paradoxalement, qu’en poussant au plus loin la volonté de l’éviter.

     

    Il faut que la pièce finisse bien.

    Même, sinon mieux, il faut à tout prix que la pièce finisse bien.

    Et cet à tout prix-là concasse les hommes.

     

    Et, puisque la comédie ne se définit en bonne règle que de finir bien, la tragédie consiste tout entière dans le fait de vouloir à ce point la comédie.

     

    La tragédie est sa corruption même.

  • Sourire

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Il se peut bien, comme d’excellents auteurs déjà l’ont dit, que l’écriture d’une tragédie, pour différentes raisons, dont quelques-unes tiennent à la haute politique – nulle part on ne trouve de souverain, qu’il soit homme ou dieu, réel et commun à représenter avec quelque respect – et les autres à la basse – l’accoutumance que nous avons à des spectacles faibles, préférant tous l’émotion à la raison –, ne soit plus possible aujourd’hui ; mais personne ne veut vraiment entendre ce corollaire, à savoir qu’en l’absence d’un référent également solide à moquer, la comédie non plus, sauf à se tromper d’objet comme on voit à toute heure, n’est pas possible… Pour autant,  il serait évidemment odieux de se rendre, je dis bien : se rendre, à la bouillie ordinaire.

     

    Si les choses ne se peuvent plus d’elles-mêmes soutenir, sans doute les faut-il soutenir de la chose opposée ; ainsi soutenir un commencement tragique d’un filigrane comique permet peut-être, en retournant la pièce, et avec l’avantage de n’en rompre aucunement l’unité, de finir une comédie en dansant sur les cadavres ; de sorte que tout le monde se réconcilie, avec une innocence de pervers, sur un tas de cadavres devenu nécessaire.

     

    Je ne veux point de rires ou larmes sains, mais de hideux sourires sur nos faces de poupons.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Voir aussi : Travails (2) et plus généralement, colonne de droite, la section Notes de travail

     

  • Travails

    Position politique 

     

     

     

     

     

     

     

    J’écris une pièce, presque une commande, jugulaire jugulaire, le premier acte est fini, les personnages tiennent leurs points cardinaux, tout est en place pour la tragédie et elle ne viendra pas, c’est ça qui est drôle et ça ne l’est pas, on est dans le système français où toutes les données sont connues dès le départ, tout est prêt à filer au tragique comme une armée en marche et il faut maintenant que ça s’envase et s’embourbe avant même le premier coup de feu, que la tragédie ce soit qu’il n’y en a pas mais alors pas, pour l’heure le premier acte est fini, plus que trois à faire, le dialogue de phrases brèves est serré à fond, digression nulle, j’aimerais qu’il visse le ventre, je ne sais pas si c’est du bon théâtre mais en tout ce n’est pas autre chose que du théâtre, j’aimerais qu’il flotte là une puissance lourde de silence, qu’on regrette de n’avoir pas le secours de la musique, tantôt légère et aérienne tantôt basse profonde à la russe, mais toujours lente et étirant le temps, rituel liturgique, liturgie je le rappelle en passant veut dire service public, et je me dis tout cela et je rigole, c’est complètement invendable je le réalise d’un coup et du coup justement je ne rigole plus, non mais quelle bande circumterrestre d’ignorants crasseux fiers sous leur mammon en merde, et je rigole quand même, et je me dis que si ça commence à être vraiment du vrai théâtre ce que j’écris, il va falloir que je me trouve assez vite un autre job…

    Allez, j’y retourne.