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rimbaud - Page 2

  • La Chanson d'amour de Judas Iscariote, de Juan Asensio

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    Il nous paraîtrait lourdement préférable, pour différents motifs qui ne lésinent pas à se contredire entre eux, de ne pas parler de ce livre. Témoigner de la lecture de ce livre, si c’est bien cela qu’un critique doit faire, nous obligerait à admettre d’emblée que nous ne pouvons honnêtement témoigner, ou pour le dire autrement, d’une manière apparemment paradoxale, que notre lecture est incapable de témoigner d’elle-même ; pire, que notre lecture avoue seulement que nous ne savons pas lire. Ce qui n’est pas chose très plaisante. Nous allons donc, en assumant notre peu reluisante malhonnêteté, ne surtout pas nous demander en quoi ce livre pourtant lu nous ferait admettre que nous ne savons pas lire, et banaliser, comme on dit badiner, c’est-à-dire parler à côté, ne serait-ce que pour le plaisir pervers, qui ne compense au fond rien, qu’une critique, même débile, en existe quand même. Il ne s’agit bien sûr, de façon passablement ordurière, par un tel exercice, que de faire porter au livre en question le chapeau de notre incapacité, de reporter sur lui notre entière responsabilité. Le silence, donc, eût été préférable. Mais banalisons, donc. Et poussons notre évidente lâcheté jusqu’à mettre en situation, à notre convenance, notre propre lecteur, c’est-à-dire : vous.

     

     

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  • Romantisme encore

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    Oisive jeunesse

    A tout asservie,

    Par délicatesse

    J’ai perdu ma vie.

    Ah ! que le temps vienne

    Où les cœurs s’éprennent.

     

    Rimbaud, Chanson de la plus haute tour

     

     

     

     

    La prime à la jeunesse, à la jeunesse foudroyée qui plus est, fut au XX° siècle très romantiquement – quoique, du moins officiellement, contre le romantisme – attribuée à ces précoces poètes que furent Lautréamont et Rimbaud.

    Mais pourquoi ?

    Pour empêcher qu’on lise Baudelaire et Verlaine, non ?

    Pour faire écran, du moins.

    Certains même voulurent voir, religieusement, en Rimbaud et Lautréamont des manifestations quasi-exclusives de la Vérité. Ils ont fini par faire de ces poètes des Bernadette Soubirous de carnaval, voire de gay pride… Sérieusement : des Bernadette Soubirous de quoi ? sinon de leurs propres engagements débiles de l’époque.

    Les Bernadette Soubirous de leur invertissement – puisque ça rapporte, donc, d’inverser…

    Ces gens-là, cadavres ou vieux barbons désormais, nous bassinent encore avec la jeunesse, la leur bien sûr, qui est en toc comme tous les marchandises désormais, jeunesse foudroyée aussi, bien sûr, mais autrement (puisque autrement est leur sésame), et on raccroche au passage 1968, le joli mois de mai des cadavres de la Fausse Commune…

    Rimbaud ni Lautréamont n’y sont pour quoi que ce soit, dans cette affaire sinistre. Ils sont même les victimes de cette affaire : ils sont devenus illisibles, invisibles sous le déluge commercial, pardon, intellectuel…

    Et Artaud, donc !

    Il a souffert, Artaud. Oui.

    Et il en a torché, des pages déchirées de douleur.

    (Le très vieux verbe français se douloir, du temps que la douleur aussi avait son verbe, se conjuguait ainsi : je me deux).

    Mais il est juste bon désormais à servir d’alibi aux poètes casse-couilles à prétentions intellectuelles, aux philosophes bien en chaires, aux metteurs en scène d’institutions, à tout cette lie de l’intelligence qui n’y entend goutte, mais cite et cite et cite, et se bâtit ainsi une moelleuse carrière à Peredelkino-sur-Seine ; à tout ce qui empile des discours secondaires

    Artaud est foutu, lui aussi.

     

    C’est peut-être la leçon de notre époque férue de quantités, et de chiffres : l’œuvre poétique demeure inconnue ou, dans le meilleur des cas, disparaît bien vite –, ou bien n’atteint à la notoriété que pour se voir annulée, annihilée (que j’entends en somme comme : annexée au néant) par des masses énormes de commentaires imbéciles, lesquels ensuite donnent lieu à simplification, à cliché – par quoi l’image du poète devient icône, ses adorateurs sourds se prosternant idolâtrement devant…

    Bref, c’est fini.

     

    (Voir aussi ici.)