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Roman - Page 7

  • Je suis un phantasme

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    Formation :

    – Ne mens que lorsque c’est inutile.

    – Expliquez-moi.

    – Non.

     

    Il a mis très longtemps à comprendre.

    Et d’abord il a compris des choses fausses.

    Et ce qu’il a aujourd’hui compris ne l’est sans doute pas moins.

     

    Il a maintenant un éventail de réponses.

     

     

     

    Un ami :

    – Tu sais ce que c’est, ton problème ?

    – Non. Mais je sens que tu vas m’éclairer.

    – C’est que tu es beaucoup trop intelligent.

    – Ça, ce serait plutôt ton problème avec moi, non ?

    – Connard.

     

    Il n’aime pas le pouvoir ; et son intelligence doit demeurer inemployée.

     

     

     

    Personne ne triche autant que celui qui croit pouvoir, de ce qu’il pense de lui et de ce qu’on dit de lui, se connaître ; et devient ainsi à lui-même son phantasme, finissant même par imaginer ce qu’on eût dit, en son absence, de lui. Combien de romans ?

     

     

     

    En son absence, donc :

    – C’est un garçon auquel il n’est pas difficile de comprendre l’adversaire.

    Le nombre de nos motivations est extrêmement limité.

    – Demandez-lui d’écrire des rapports, alors.

    – Nous l’avons fait. Ils sont très simples. Mais nous les lisons mal.

    – Et dans l’action ?

    – Ou il désarme l’adversaire comme on retire à un enfant son jouet ; ou il prend toute la charge pleine gueule.

    – Et dans le second cas ?

    – Eh bien, il s’en fout.

    – Il s’en fout vraiment, ou bien est-ce affecté ?

    – Je ne sais pas.

    – De toute façon, ça revient au même.

    – Oui.

    – Bloquez-le dans des tâches subalternes. Humiliez-le doucement.

     

    Ceci est un autoportrait triché.

     

    Par exemple, il ne contient pas de dialogue avec des femmes.

    J’ai déjà donné.

     

     

     

     

     

     

     

  • Croupir

    On ne peut pas dire que je surestime le théâtre de mon époque ; il arrive donc qu’on me demande pourquoi je n’écris pas des romans…

     

    Je ne m’intéresse presque plus aux actualités, aux nouvelles, aux informations, aux médias ; ils passent quand même. Le monde ne bruit pas d’autre chose.

    Au vu du français qu’on enseigne à l’école, et des livres que publient de sinistres coteries parisiennes, il faut admettre que lire ce qui paraît ne doit plus avoir pour quiconque d’un peu intelligent la moindre espèce d’intérêt.

    Ne pas lire peut aussi être un acte critique. 

     

    (La seule chose, généralement ignorée dans les campagnes, qu’on peut finalement apprendre de Saint-Germain-des-Prés, et qui a également l’immense avantage de dispenser de s’y rendre, c’est que le mot pré peut avoir pour adjectif pratin.)

     

    Lire un roman, désormais, c’est tolérer une manière de journalisme amateur qui ne prétendrait même pas, alors que cela seulement pourrait être un peu drôle, dire quelque chose d’important (– Alors, tu la craches, ta gavalda ?) ; ou inversement, qui prétendrait tellement à la révélation, au sens journalistique, d’importance, qu’il en deviendrait aussitôt stupide de boursouflures (Dan Brown, par exemple).

    J’attends donc la sortie, je ne sais quand, du prochain roman de Houellebecq.

     

    De toute façon, on est bons pour le cinéma et, bêtise pour bêtise, personne d’un peu sensé ne fait même plus mine d’en attendre quoi que ce soit d’un peu intelligent.

     

    Adios.

     

     

     

     

     

     

     

  • Pendant ce temps, les ânes gueulent en massacrant des harpes

    Qui sages est nel deit celer,

    mais pur ceo deit son sen monstrer

    que, quant sera del siecle alez,

    en seit puis toz jours remembrez.

    Si danz Homers et danz Platons

    et Virgiles et Citherons

    lor sapence celasant,

    ja ne fut d’els parlé avant.

    Por ce ne voil mon sen taisir,

    ma sapience retenir,

    ainz me delite a conter

    chose digne de remembrer.

    Tous se taisent cil del mestier

    si ne sont clerc ou chivalier :

    ensement poent escouter

    come li asnes a harper.

     

    Celui qui est sage ne doit pas le cacher,

    mais doit au contraire montrer son savoir

    pour que, quand il aura quitté ce monde,

    on se souvienne toujours de lui.

    Si maître Homère et maître Platon,

    et Virgile et Cicéron

    avaient caché leur sagesse,

    jamais depuis lors on n’aurait parlé d’eux.

    Qu’ils se taisent tous, ceux de ma profession,

    s’ils ne sont clercs ou chevaliers :

    ils sont tout aussi capables de m’écouter

    qu’un âne de jouer de la harpe.

     

    Anonyme, Le Roman de Thèbes, vers 1 à 16, milieu du XII° siècle.

    Traduction de Francine Mora-Lebrun

     

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    Quatrième de couverture :

    « Libre adaptation de La Thébaïde de Stace – épopée latine qui raconte le conflit fratricide des deux fils d’Œdipe – composé vers le milieu du XII° siècle, Le Roman de Thèbes est le tout premier roman rédigé en français. Il a sans doute vu le jour à la cour brillante de Henri II Plantagenêt et d’Aliénor d’Aquitaine, qui était alors le centre cultivé le plus attractif de tout l’Occident. Le clerc cultivé qui en est l’auteur, en pratiquant un anachronisme concerté, nourri notamment par des souvenirs de la Première Croisade, s’efforce de faire revivre l’Antiquité dans les consciences médiévales. Encore tributaire à certains égards des chansons de geste, et surtout de La Chanson de Roland à laquelle il se réfère plusieurs fois, il procède aussi à leur remise en question en élaborant les principes d’une nouvelle écriture narrative, la « mise en roman ». »

     

  • La route, de Cormac McCarthy

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    Ce qui est saisissant, dès les deux premières pages de La Route, c’est l’impression très forte, très nette, qu’aucun écrivain français n’aurait pu écrire aujourd’hui deux pages comparables, ni au surplus les achever ainsi :

    Il ne savait qu’une chose, que l’enfant était son garant. Il dit : S’il n’est pas la parole de Dieu, Dieu n’a jamais parlé.

     

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