Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Pendant ce temps, les ânes gueulent en massacrant des harpes

Qui sages est nel deit celer,

mais pur ceo deit son sen monstrer

que, quant sera del siecle alez,

en seit puis toz jours remembrez.

Si danz Homers et danz Platons

et Virgiles et Citherons

lor sapence celasant,

ja ne fut d’els parlé avant.

Por ce ne voil mon sen taisir,

ma sapience retenir,

ainz me delite a conter

chose digne de remembrer.

Tous se taisent cil del mestier

si ne sont clerc ou chivalier :

ensement poent escouter

come li asnes a harper.

 

Celui qui est sage ne doit pas le cacher,

mais doit au contraire montrer son savoir

pour que, quand il aura quitté ce monde,

on se souvienne toujours de lui.

Si maître Homère et maître Platon,

et Virgile et Cicéron

avaient caché leur sagesse,

jamais depuis lors on n’aurait parlé d’eux.

Qu’ils se taisent tous, ceux de ma profession,

s’ils ne sont clercs ou chevaliers :

ils sont tout aussi capables de m’écouter

qu’un âne de jouer de la harpe.

 

Anonyme, Le Roman de Thèbes, vers 1 à 16, milieu du XII° siècle.

Traduction de Francine Mora-Lebrun

 

Roman de Thèbes.jpg

 

Quatrième de couverture :

« Libre adaptation de La Thébaïde de Stace – épopée latine qui raconte le conflit fratricide des deux fils d’Œdipe – composé vers le milieu du XII° siècle, Le Roman de Thèbes est le tout premier roman rédigé en français. Il a sans doute vu le jour à la cour brillante de Henri II Plantagenêt et d’Aliénor d’Aquitaine, qui était alors le centre cultivé le plus attractif de tout l’Occident. Le clerc cultivé qui en est l’auteur, en pratiquant un anachronisme concerté, nourri notamment par des souvenirs de la Première Croisade, s’efforce de faire revivre l’Antiquité dans les consciences médiévales. Encore tributaire à certains égards des chansons de geste, et surtout de La Chanson de Roland à laquelle il se réfère plusieurs fois, il procède aussi à leur remise en question en élaborant les principes d’une nouvelle écriture narrative, la « mise en roman ». »

 

Commentaires

  • Ah ah, très bonne la comparaison! Merci pour cet extrait. Il me semble avoir bossé sur "Le roman de Thèbes" comme un crétin d'aspirant capéssien... Autant dire que le grattais les cordes avec mes sabots!

  • Et alors ? Hamlet 3 ? J'attendais la fin pour "commenter". Commenter est un grand mot vu que je n'ai jamais lu Schmitt! Mais cette scène "pour Hécube", ah, que j'ai pu la travailler, à une époque ! Au point que je finissais par me demander si le théâtre, plutôt que d'être le piège dans lequel "j'attraperai la conscience du roi", n'était pas en train de devenir le piège qui attrapait la mienne.
    Je n'ai jamais lu non plus Le roman de Thèbes, mais des, ânes jouant de la harpe, hélas, j'en ai entendu. Le siècle, qui veut ça !
    Bon dimanche à vous.

  • Halmet III - Le Retour de la Vengeance - est actuellement en postproduction dans mon crâne, cher Solko. Bientôt sur votre écran (c'est le cas de le dire).

Les commentaires sont fermés.