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  • Cool

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Sur notre autoroute, les cadavres servent de bornes kilométriques ; ainsi, ils servent encore et personne ne les voit. Tous les dix kilomètres, il y a un fœtus éclaté. Celui-là, au moins…

    Ce qui serait vraiment criminel, c’est de les laisser traîner. C’est ce que j’ai dit en reprenant une bière tiédasse. Celui-là, au moins, n’a pas su qu’il souffrait. C’est quand même bon, de rire. Ma collègue a rigolé aussi.

    Regarde comment il est mort, celui-là : il marchait, la voiture l’a fauché volontairement, les gars sont descendus, puis ils l’ont un peu éventré, ils l’ont castré et lui ont fait manger ses couilles. Durée : quatre minutes vingt. Il a mis des heures à crever, ensuite.

    Ouais, c’est un peu ennuyeux, à force. La bagnole, les coups, le bouffage de couilles, c’est bien ; mais l’agonie dure trop vraiment longtemps. On s’emmerde. On la coupera au montage. Vous conduisez dans un état proche de l’hypnose.

    Ou on garde une image pour une minute. Les neuf heures d’agonie sans intérêt en accéléré, soit vingt-deux secondes et quelques de film. Comme l’éclosion d’une fleur. L’écran me fatiguait les yeux.

    J’ai ouvert la bière, c’était vraiment une bonne soirée. Je ne suis pas rentré trop tard, j’avais envie de baiser.

     

     

     

     

     

     

  • Imago mortis

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Peut-être était-ce à cause de la musique dans l’habitacle, mais le paysage plat – vert éclatant des jeunes pousses, ciel gris, champs de fleurs jaunes –  rompu en son mitan par la voie romaine, m’a aujourd’hui paru relever tout à fait de la science-fiction. Je me sentais là comme chez moi, impeccablement seul, me mouvant sans effort, ne comprenant pas un mot de ce qui était chanté, dans ce paysage où je n’habite pas. Extase douce dans la matrice automobile. Une façon sans doute de sommeil.

  • Cras mane

     

     

     

     

     

     

     

     

    Il la regarde plutôt que le frigo

    Et elle par la fenêtre le ciel.

     

    Elle dit une chose banale

    Du café ?

    Dont son esprit est à mille lieues

    Puis elle lui sourit

    Attendant sinon sa réponse

    Sa voix.

     

    Lui songe à ce rêve qu’il a fait

    Au-dedans un secret

    Dont il ne parlera jamais

    Puis il lui répond

    Avec des mots banals

    Les mêmes.

  • L'aversion officielle

    Culutre.aff.NB.jpg

    Je donne ici une nouvelle scène de Pour une Culutre citoyenne !, laquelle met aux prises, si j’ose dire, un jeune metteur en scène (sic) et son conseiller théâtre (sic aussi) d’une institution nationale point nommée.

    Les comédiens jouant cette scène, dans le spectacle que nous avons donné, et qui, étrangement, n’a guère tourné, étaient Arnaud Frémont et Elena Lloria Abascal.

    Cette scène, chaque fois, fut la plus drôle, et, dans les discussions âpres qui parfois ont pu suivre le spectacle, elle ne fut jamais considérée comme porteuse d’une exagération manifeste.

    Elle suit, d’un bloc.

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  • Narcissisme

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    La manière dont chaque matin tu parais dans ton miroir, en réalité, est très étudiée : tu ne t’y surprends jamais.

    C’est en descendant de voiture, dans une vitre posée là par hasard, que finalement tu t’es vu : pas rasé, tassé, un peu voûté avec du bide, les cheveux en pétard, le teint gris du rat de bibliothèque fumeur.

    En somme, c’est dans l’intimité que tu fabriques chaque matin l’image que tu veux croire que les autres ont de toi.

    Et tout le reste, je le crains, est à l’avenant…