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Theatrum Mundi - Page 6

  • Tremble, Daech !...

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    Bataille de Wagram, 6 juillet 1809, par Horace Vernet

     

    J’estime qu’ils ont tort de jouer de la sorte.

     

    Après les attentats de janvier 2015, qui firent 17 morts dans Paris, sans doute surprise par ce brusque accès d’une violence aveugle qu’elle avait cru définitivement cantonnée à son ignoble passé historique qu’elle faisait tout pour oublier, la France avait bêtement omis de riposter (autrement qu’en brandissant et affichant des papiers) ; après les attentats de novembre 2015, qui firent 130 morts dans Paris, la France, déclarée en état d’urgence jusqu’à la disparition d’un ennemi qu’elle se refusait à nommer et combattre, enfin unie derrière le plus grand chef de guerre qu’elle ait connu depuis le général Bonaparte, riposta par une impitoyable révision constitutionnelle, qui, la divisant elle-même au passage, ne devait probablement servir à rien, sinon à fort heureusement restreindre un peu les libertés publiques de citoyens par avance soupçonnés de ne pas se satisfaire d’une telle riposte.

    En hommage à nos gouvernants de rencontre, « chétive espèce » de « pauvres nains vainqueurs », ce poème – qui les décrit exactement, non moins que la réaction saine à laquelle inconsidérément ils s’exposent – tiré des magnifiques Châtiments de Victor Hugo :

     

    Ô drapeau de Wagram ! ô pays de Voltaire !

    Puissance, liberté, vieil honneur militaire,

    Principes, droits, pensée, ils font en ce moment

    De toute cette gloire un vaste abaissement.

    Toute leur confiance est dans leur petitesse.

    Ils disent, se sentant d’une chétive espèce :

    – Bah ! nous ne pesons rien ! régnons. – Les nobles cœurs !

    Ils ne savent donc pas, ces pauvres nains vainqueurs,

    Sautés sur le pavois du fond d’une caverne,

    Que lorsque c’est un peuple illustre qu’on gouverne,

    Un peuple en qui l’honneur résonne et retentit,

    On est d’autant plus lourd que l’on est plus petit !

    Est-ce qu’ils vont changer, est-ce là notre compte ?

    Ce pays de lumière en un pays de honte ?

    Il est dur de penser, c’est un souci profond,

    Qu’ils froissent dans les cœurs, sans savoir ce qu’ils font,

    Les instincts les plus fiers et les plus vénérables.

    Ah ! ces hommes maudits, ces hommes misérables

    Eveilleront enfin quelque rébellion

    A force de courber la tête du lion !

    La bête est étendue à terre, et fatiguée ;

    Elle sommeille, au fond de l’ombre reléguée ;

    Le mufle fauve et roux ne bouge pas, d’accord ;

    C’est vrai, la patte énorme et monstrueuse dort ;

    Mais on l’excite assez pour que la griffe sorte.

    J’estime qu’ils ont tort de jouer de la sorte.

     

     

  • Sentences I

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    Question

    En fait, je m’imagine mal comment des gens qui, plus ou moins volontairement, se soumettent à l’ordre existant pourraient dire autre chose que ce que celui-ci attend.

     

    Arrêt

    Dans une époque aussi morose, aussi conne, faite d'ennui institué et de corruption revendiquée, réussir lui paraissait un sommet de vulgarité et de prostitution; pour autant il ne se laissait pas tout à fait descendre jusqu'aux bas-fonds de la société, parce qu'une idée ancienne de la dignité en même temps qu'une lâcheté de premier choix lui faisaient mépriser le crime – le crime et ses justifications intellectuelles pitoyables ; et c'est ainsi, de compromis médiocre en compromission inconnue, qu'il se maintenait à flots, comme il pouvait, péniblement, et se confondait tout entier à cette époque qu'il croyait détester, étant lui-même devenu morose, con, ennuyé, corrompu.

     

    Chaise

    Un homme debout, qui vocifère et gesticule, ignorant ainsi simplement chercher à se rassurer, en s'adressant à une assemblée de gens assis, passablement distraits, attendant seulement qu'il ait enfin bientôt fini, et qui ne lui obéiront à coup sûr que sous la contrainte ou, plus probable encore, le courage étant si déprécié, sous la simple menace de la contrainte, ne détient qu'un pouvoir fort médiocre, vivant de sentimentalisme et d'illusion, pouvoir qu'il sait extrêmement menacé par l'hystérie critique qu'il suscite chaque fois davantage dans son dos, qu'il pressent et devine et même qu'il s'exagère au point d'entrer de nouveau dans cette dimension panique qui lui fera de nouveau s'exciter en discours, ce qui ne le rassurera lui-même que de plus en plus brièvement et fera croître encore cette hystérie sourde qui, parvenue à son acmé, finira par le renverser : par l'exercice du droit si c'est possible, et dans le sang sinon (et c'est par tout cela qu'un tel forcené politique, inquiétant dans la réalité, dégage dans la fiction un aussi fort potentiel comique) ; l'homme simplement assis, calme et parlant doucement d'une voix assurée à un parterre de gens debout, ou même assis, attentifs et désireux d'obéir, non par veulerie mais parce que leur esprit critique, ayant délibéré, les a assurés du bien-fondé d'une telle obéissance, dispose d'une immense autorité, dont l'idéal serait qu'elle fût fondée sur une bienveillance absolument tacite (il est évident qu'une telle modélisation est parfaitement théorique, toujours trahie peut-être par cet inévitable tremblement du faux dans la voix ou les mains, n'a jamais eu sans doute de réalité autre que légendaire, indiquant en creux cela vers quoi il faudrait tendre et vers quoi tendent, avec plus ou moins de succès, les plus doués des hommes d'Etat) ; il arrive évidemment que le gueulard nervaillon s'essaie à de brefs moments à donner l'illusion du calme et de l'autorité, mais il est dans cette extravagante prétention constamment démenti par lui-même, et chacun dans l'assistance peut remarquer à quel point cet homme se contrefait, et caricature in fine cette autorité naturelle dont il avait été, naïvement peut-être, bêtement sans doute, perversement à coup sûr, tenté de donner l'illusion (et c'est par cela que l'imitation d'un tel comportement, par l'effet de distance que permet la représentation, peut produire un effet comique subtil, léger, bien moins outrancier que dans sa version vociférante, mais plus inquiétant aussi).

     

     

  • Un si joli prénom

    Il est dix-huit heures passées, je suis seul au café. A la table voisine, une jeune femme. Enceinte. Vraiment pas loin du terme. Elle boit un thé. Son ami, son compagnon, son mari peut-être (non, pas d'alliances), arrive. Commande une bière. J'essaie de lire mon livre. C'est un petit livre d'Enzensberger, Le perdant radical. Ce qui n'a rien à voir avec ce que je vous raconte, d'ailleurs. Mais enfin. J'arrête de lire quand je comprends que mon jeune couple d'à côté entre dans la grande discussion du choix du prénom de l'enfant à venir. Une fille, en l'espèce. Je ne veux pas rater ça. Discussion qui n'a jusque là pu aboutir. Ce sur quoi ils sont d’accord, c’est que le prénom devra rester secret jusqu’à la naissance, absolument secret, même à ta sœur tu dis rien. Mais bon, le terme approche, la pression monte. Un peu hors sujet, le gars dit que si ça avait été un garçon, il aurait bien aimé Cyprien. A cause de quelqu'un de sa famille, un oncle, je crois, ou son parrainLa jeune femme réoriente la conversation. Les prénoms féminins fusent, dont un Zélie, un Aliénor, un Calvina et même un Enza qui serait le féminin d'Enzo, et je replonge utilement dans mon passionnant Perdant radical. Chaque fois que l'un prononce un prénom, l'autre fait la moue ou s'exclame non, pitié, pas ça! ou j'en connais déjà deux, dont une adulte qui, franchement... Au bout de vingt-cinq minutes de refus réciproques, et de propositions qui me semblent de plus en plus atterrantes, UhainaCunégonde (je vous jure), Narbella ( ?) qui fait plus diversité sans faire islamique, etc., la jeune femme revient tout à coup au début de la conversation et demande c'était quoi déjà le prénom que tu aimais bien de ton cousin ? Cyprien. Ce serait quoi, tu crois, le féminin de Cyprien ? Ben, Cyprienne... non ? Ah ouais non c'est moche... Pour ma part, je replonge un peu le nez dans le bouquin d'Enzensberger. « Plus son projet est voué à l'échec, plus le fanatisme avec lequel il le poursuit s'accroît  (p. 26) ». Tout à coup, un cri commun de joie salue l’exploit : le prénom est trouvé ! J’ai raté ça. Bordel de merde. Tant pis. Mais tout n’est peut-être pas perdu. Le gars dit ça s’arrose et tend sa paume à la jeune femme qui y claque la sienne, puis ils se penchent tous deux (surtout lui) par-dessus la table et s’embrassent brièvement. Puis il commande deux coupes de champagne ; je ne boirai pas toute la mienne, dit-elle. On les sert. Ils trinquent. – A Cyprine ! – A Cyprine ! Ils sont radieux. Pourvu qu’ils gardent le secret.

     

     

     

  • Le président, la journaliste et rien / 1. Onze Novembre

    2011

    Je m’étais donné une grosse dizaine de jours, entre Toussaint et Onze-Novembre 2011 pour écrire la pièce.

    Une scène par jour, sans relire. 12 scènes assez courtes.

    Une chose légère, une pochade… phrases simples, répliques brèves.

    Une chose facile à monter. Mais précise.

    Il devait y avoir deux personnages, un président de la République, une journaliste.

    La scène se passe à l’Elysée. L’Etat, les médias, la nécrose.

    Sur la fin, un troisième personnage s’est imposé.

    Le Soldat inconnu ; ou sinon lui-même, son fantôme.

    Le Onze-Novembre donc, j’avais fini.

    Ça s’appelait : LE SOUVERAIN, LE DIABLE ET MOI.

    On n’y trouvait aucun souverain, pas de diable et surtout pas de moi.

     

    2012

    J’ai augmenté la pièce en février 2012.

    Des chœurs un peu trop malins, une savante mise en abîme. Saloperies littéraires.

    Puis j’ai abandonné la pièce en rade, mal achevée.

    Dans la foulée, j’ai suspendu toute activité théâtrale, marre des censeurs, et de la bêtise culturelle.

     

    2014

    Je suis revenu à ce texte en novembre 2014. Presque par hasard.

    Elle résonnait tout autrement, cette histoire d’un président et d’une journaliste…

    En décembre, j’ai coupé un tiers du texte de 2012.

    Grosso modo je suis revenu à la version initiale de novembre 2011.

    J’ai commencé à en causer à mes amis acteurs Lucie Boscher et Fred Pougeard.

     

    2015

    C’était étonnant d’avoir sous les yeux une pièce composée en 2011 et racontant ces amours molles au sommet de l’Etat, et puis la lente désagrégation de tout…

    En février et mars 2015, j’y ai fondu une intrigue parallèle.

    Au final, l’ensemble comporte 17 scènes.

    Fred Pougeard jouera le président, Lucie Boscher la journaliste, moi le soldat inconnu.

    J’avais encore, par habitude, l’idée de la scène, de la représentation, du théâtre.

    Alain Julien s’est proposé de nous filmer. Il s’agira de filmer un théâtre qui ne se jouera pas dans un théâtre.

    J’ai réfléchi au titre, inchangé depuis 2011 (et que je continue d’aimer), et lui ai préféré celui-ci, plus prosaïque, plus franc : LE PRÉSIDENT, LA JOURNALISTE ET RIEN.

    Parce que, pour le coup, il y a bien un président, une journaliste et surtout rien.

    Rien. On ne demande rien, pas de soutien de théâtres ni d’argent public, je n'ai pas de temps à perdre et pas besoin d'autorisation.

    On a commencé à faire des lectures. Avec Fred et Lucie. Puis des lectures en jeu..

    La pièce a commencé d’être traduite en anglais par Catriona Morrison.

    La scène du rêve, la scène 7, ne passait pas ; elle devait être l’envers du reste de la pièce et elle était écrite comme le reste de la pièce…

    En novembre, j’ai réécrit la scène 7. En vers. Alexandrins pour la plupart. Ca l’a développée. Du coup, pour l’équilibre, j’ai réécrit, en vers encore, une partie de la scène (onirique aussi, à sa façon) du  Soldat inconnu.

    J’ai fini ça le Onze-Novembre. Décidément.

    On en est là.

    A bientôt faire une vidéo de cette pièce, Lucie, Fred, Alain et moi.

    Peut-être en feuilleton, c’est à voir.

    Pour figurer l’Elysée, on cherche une casemate, un garage à l’abri du bruit, un lieu insolite, au moins pas habitable. Pour y tourner. A Reims. Ou vraiment juste à côté.

     

     

     

     

  • Fermeture

     

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