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  • Croupir

    On ne peut pas dire que je surestime le théâtre de mon époque ; il arrive donc qu’on me demande pourquoi je n’écris pas des romans…

     

    Je ne m’intéresse presque plus aux actualités, aux nouvelles, aux informations, aux médias ; ils passent quand même. Le monde ne bruit pas d’autre chose.

    Au vu du français qu’on enseigne à l’école, et des livres que publient de sinistres coteries parisiennes, il faut admettre que lire ce qui paraît ne doit plus avoir pour quiconque d’un peu intelligent la moindre espèce d’intérêt.

    Ne pas lire peut aussi être un acte critique. 

     

    (La seule chose, généralement ignorée dans les campagnes, qu’on peut finalement apprendre de Saint-Germain-des-Prés, et qui a également l’immense avantage de dispenser de s’y rendre, c’est que le mot pré peut avoir pour adjectif pratin.)

     

    Lire un roman, désormais, c’est tolérer une manière de journalisme amateur qui ne prétendrait même pas, alors que cela seulement pourrait être un peu drôle, dire quelque chose d’important (– Alors, tu la craches, ta gavalda ?) ; ou inversement, qui prétendrait tellement à la révélation, au sens journalistique, d’importance, qu’il en deviendrait aussitôt stupide de boursouflures (Dan Brown, par exemple).

    J’attends donc la sortie, je ne sais quand, du prochain roman de Houellebecq.

     

    De toute façon, on est bons pour le cinéma et, bêtise pour bêtise, personne d’un peu sensé ne fait même plus mine d’en attendre quoi que ce soit d’un peu intelligent.

     

    Adios.

     

     

     

     

     

     

     

  • Banalités

     

     

     

     

     

     

    Souvent – parfois ne serait pas assez –, marchant au hasard de la ville et de ses rues, des bribes de dialogues, étrangement désarrimées de toutes personnes, personnages ou même visages, flottent dans ma tête. (Peut-être que j’entends leurs voix, ou bien leur prête mentalement la mienne ; quoiqu’il me semble parfois songer à des voix féminines… Non, je ne suis pas cinglé, merci.)

    Celle-ci, par exemple, l’autre jour :

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  • La création veut des pièces nulles !

    Invité en guise de changement de décor, à lire trois minutes de texte sur l’art du théâtre à la suite du directeur du théâtre et d’un comédien, j’ai donné ce petit montage :

     

     

     

     

     

    L’intellectuel irrite l’homme cultivé comme l’adolescent irrite l’adulte, non par l’audace de ses idées mais par la banalité de ses présomptions.

     

    Nicolas Gomez Davila

     

    [Je précisai ensuite, pour la compréhension de l’auditoire, que ce qui est nommé régie dans le texte qui suit est ordinairement nommé mise en scène, et régisseur metteur en scène.]

     

    La mise en scène est-elle une création ou une interprétation ?

    Le créateur, au théâtre, c’est l’auteur. Dans la mesure où il nous apporte l’essentiel. Quand les vertus dramatiques et philosophiques de son œuvre sont telles qu’elles ne nous permettent aucune possibilité de création personnelle, lorsque nous nous sentons encore, après chaque représentation, son débiteur. Ce qui ne signifie pas que l’œuvre soit parfaite. La perfection d’ailleurs, c’est Voltaire dramaturge.

    Donner son sens, par le jeu des corps et de l’âme des interprètes, à une scène de Shakespeare par exemple, est une tâche qui exige du régisseur l’emploi de toutes ses facultés d’artiste, mais ça n’est jamais qu’une œuvre d’interprétation. Le texte est là, riche au moins d’indications scéniques incluses dans les répliques mêmes des personnages (mise en place, réflexes, attitudes, décors, costumes, etc…). Il faut avoir la sagesse de s’y conformer. Tout ce qui est créé hors de ses indications est « mise en scène » et doit être de ce fait méprisé. Et rejeté. J’ai pris l’exemple de Shakespeare parce que chacune de ses œuvres offre au régisseur trop imaginatif l’illusion et les tentations de la création. Ce n’est pas l’imagination du régisseur qui doit ici imposer la vue d’un personnage, cela est insupportable ; c’est le personnage qui, suffisamment dépouillé, doit rester « ouvert » à l’imagination du public. Ce dépouillement, facilité déjà par les rares indications scéniques de Shakespeare, implique bien entendu un jeu plastique ordonné, sans bavure, mais exige par contre du comédien une sensibilité toujours frémissante, toujours en contact avec le public.

    Je me permets d’ajouter que si le régisseur faisant « répéter » un chef d’œuvre se considère comme un créateur, j’en dirais autant des comédiens. Et du public aussi, pourquoi non ? Rappelez-vous cette boutade des vieux comédiens : « l’auteur écrit une pièce, le comédien en joue une autre, le public en comprend une troisième ». Mais alors, je vous le demande, qui sera un interprète ? Quand ça ne serait que pour donner un sens précis à chaque mot de notre profession, il serait indispensable de s’en tenir à une distinction raisonnable en ce qui concerne les notions de créateur et d’interprètes.

    Il reste cependant un champ clos où le metteur en scène affamé de création peut trouver pâture à son génie dévorant : lorsque la pièce est nulle ; lorsqu’elle n’est plus, à l’implacable usure des répétitions, qu’un prétexte, un inévitable aide-mémoire. Parmi les pratiques du comédien, il existe cependant un art authentique de création. Celui du Mime. « Un canevas, et mon corps parle. »

     

    Jean Vilar  

     

    [J’ajoute que l’art du mime a certainement disparu avec le respect, et donc la possibilité, du silence.]

     

    Lorsque la rouerie commerciale des uns exploite la crédulité culturelle des autres, on parle de diffusion de la culture.

     

    Nicolas Gomez Davila

     

     

     Je conclus donc par ce titre : La création veut des pièces nulles !

  • Production

    production théâtrale.jpg

    C’est étonnant, tout de même, comme je n’entends personne se plaindre qu’il n’y ait plus de critique théâtrale qui ne soit pas avant tout publicitaire ; cela vient peut-être de ce que tous les gens du milieu cherchent la publicité, non la critique ; cela vient donc à coup sûr du fait qu’il n’y a pas d’œuvres.

     (Quoi, j’ai dit un gros mot ? Des « productions », comme on dit pour ne pas dire des produits, ce ne sont pas nécessairement des œuvres.)

    Aucune importance, donc.