réalité
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Aux abois
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Guerre contre la réalité
Il y a une guerre contre l’âge adulte.
Une guerre gagnée.
Une guerre qu’il ne faut jamais bien sûr finir de gagner.
D’éternels adolescents moquent, avec talent parfois, ne soyons pas bégueule, tout ce qui, de près ou de loin, ressemble à une attitude responsable, consciente des réalités.
On a tellement dégueulé les réalistes, non sans raison parfois, tant nombre d’entre eux furent médiocres et plats, qu’on en est venu à censurer la réalité elle-même.
Il faut dire que ça va plus vite, et que nous ne jurons que par la vitesse.
Cette guerre, évidemment, culmine en infantophilie généralisée.
En infantomanie.
Il y a une guerre contre l’âge adulte.
Une guerre contre la réalité.
Une guerre rêvée contre la guerre réelle.
On défendra donc l’enfance, le rêve, l’adolescence, les marginalités, les déviances, la folie, l’utopie…
Puis, et c’est le point, on les institutionnalisa.
Voilà le crime.
Toutes ces choses, l’enfance, le rêve, l’adolescence, les marginalités, les déviances, la folie, l’utopie, elles existent. Elles peuvent tout à fait exister. Qu’elles tombent ensuite, pour certaines, sous le coup de la loi, c’est autre chose. Loi ou non, justice ou pas, elles existent.
Ce sont des choses qui ne se contestent pas. Contester l’existence de ce qui existe mène également au crime. C’est symétrique.
Mais pourquoi faire la norme de ces choses qui précèdent, accompagnent ou pourrissent l’âge adulte ?
Pourquoi les institutionnaliser ?
Sinon pour défendre – mais pas au sens d’interdire, non – en sous-main, comme malgré soi, le crime ?
Sinon pour institutionnaliser le crime même ?
Toujours le même fond de romantisme.
Avec ses pourritures et ses viscères.
L’âge adulte est banni.
Tout ce qui n’est pas lui l’a remplacé.
Avec lui, la raison est bannie.
Mise au ban, oui.
L’épithète raisonnable est devenue infamante.
Mais ce n’est pas venu comme ça.
C’était prévisible.
Des gens d’ailleurs l’avaient prévu, qu’on a fait taire.
Il y eut d’abord une guerre contre l’idée de Père.
Si, si, je vous jure.
De là date sans doute cette inversion de la polarité du monde.
L’inversion, c’est ce qui a précédé l’invertissement.