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roman - Page 8

  • Torture sympa

    Un vrai roman, même passablement mauvais, quand on le trouve aujourd’hui, est un genre d’événement positif. Tout l’agrément d’un Houellebecq, pour l’instant, tient à cela.

    Il n’est pas du tout assuré, malgré les chiffres, que la position du roman soit littérairement préférable à celle du théâtre ou de la poésie ; on pare simplement n’importe quoi de ces noms hier prestigieux. Qui, publiant un essai, se souvient de Montaigne ? C’est une culture entière, et pas seulement littéraire, qu’il s’agit de n’en pas finir d’achever.

     

    La production encore dite littéraire, essentiellement romanesque, est presque exclusivement devenue une manière de journalisme un petit peu supérieure – au moins quantitativement, si l’on tient pour première supériorité le simple fait de faire plus long –, qu’elle soit ou non le fait de journalistes patentés.

    Il est aujourd’hui presque aussi vulgaire de publier un livre que de passer à la télévision.

     

     

     

     

    (Cette petite chose écrite pourra être le début d’une plus longue.)

     

  • L'enseignement de l'ignorance (2)

    Jules Ferry.jpg

     

    Ce billet suit le précédent (car je ne crains pas le pléonasme).

     

    Elle envoya donc l’enfant à l’école où les acquisitions de ce jeune esprit ne dépassèrent pas, en plusieurs années, l’art d’écrire sans orthographe et de calculer sans exactitude. Mais la vase de divers égouts n’eut pas de secret pour elle. Le biceps arithmétique ne devait se développer que plus tard, à l’arrivée de l’argent.

     

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  • Lectures de Madame Bovary

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    Flaubert disséquant Madame Bovary. Caricature d'A. Lemot parue dans La Parodie en 1869.

     

     

     

     

     

    – Il se peut que je revienne de temps en temps. Ou même souvent…

    Je lève la tête. Un femme dans les quarante ans, sanglée impeccable dans son imper, petit foulard, bien coiffée, cheveux roux standard. A côté d’elle, sa fille, douze ou treize ans.

    – C’est que, voyez-vous, je suis fâchée avec la Fnac et les grosses chaînes.

    Je pose le bouquin que je feuilletais, le Cahier de l’Herne sur René Girard peut-être.

    Elle continue.

    – Vous avez le souci des plaisirs ?

    Je rigole (discrètement) à la formulation.

    – Pardon ? demande la jeune libraire, interloquée.

    – Oui, Le souci des plaisirs. Le dernier Michel Onfray.

    Michel Onfray. Le philosophe top mode. Qui non content de ne rien comprendre à ce qu’il déteste et vomit, insulte aussi tout ce qu’il défend et abaisse.

    – Ou bien vous n’avez vraiment que le traité d’athéologie…

    Bourgeoise, va.

    Je me promène dans les rayons.

    Pour le souci des plaisirs, il va falloir commander, ma grande.

    Elle commande.

    S’en va, flanquée de sa fille morne, écrabouillée déjà.

    La même bonne femme, il y a cinquante ans, serait venue ici chercher missel ou bréviaire, qui demande aujourd’hui, pas moins compassée, le souci des plaisirs, par l’auteur du traité d’athéologie.

    Emma Bovary, aujourd’hui, se touche-t-elle en lisant du Onfray de gauche épicurée ? Ou bien Onfray est-il l’arsenic de son suicide ? Je me souviens d’un ami plus âgé que moi, qui disait il y a peu, parlant de bourgeoises : « Quarante ans après la libération sexuelle, elles sont salopes de tout, sauf du cul. » Belle formule. Qu’évidemment, je désapprouve formellement. Pourquoi diantre faudrait-il qu'elles fussent salopes ?

    – Eh bien, dis donc, c’est une sacrée librairie paroissiale ici, dis-je.

    – Pourquoi tu dis ça ?

    – A cause de ta cliente.

    – Je vois. Bobo à mort. Mais ça, c’est comme quand je vais au marché bio, il n’y a que des connards en quat’quat.