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critique - Page 21

  • Piège

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Nous vivions sur de béantes contradictions.

    Il ne s’agissait pas de les résorber, mais simplement de les donner à voir pour ce qu’elles étaient.

     

    Cela n’a pas suffi.

     

    Eclairer l’abîme, peut-être, n’est pas à échelle d’homme.

    – Mais, il n’y a rien à voir…

    – Peut-être, mais c’est cela qu’il faut voir.

    Eh bien, ça ne marche pas.

     

    On se trouve fier du piège, on s’est seulement piégé.

     

     

  • A tout prix

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    Peut-être la pièce ne rencontre-t-elle la tragédie, paradoxalement, qu’en poussant au plus loin la volonté de l’éviter.

     

    Il faut que la pièce finisse bien.

    Même, sinon mieux, il faut à tout prix que la pièce finisse bien.

    Et cet à tout prix-là concasse les hommes.

     

    Et, puisque la comédie ne se définit en bonne règle que de finir bien, la tragédie consiste tout entière dans le fait de vouloir à ce point la comédie.

     

    La tragédie est sa corruption même.

  • En attendant Darcos...

    Le texte qui suit a maintenant dix ans, voyez comme il se conclut :

     

    Quant à l’élimination de toute common decency, c’est-à-dire la nécessité de transformer l’élève en consommateur incivil et, au besoin, violent, c’est une tâche qui pose infiniment moins de problèmes [que d’imposer volontairement la « dissolution de la logique », note du copieur]. Il suffit ici d’interdire toute instruction civique effective et de la remplacer par une forme quelconque d’éducation citoyenne, bouillie conceptuelle d’autant plus facile à répandre qu’elle ne fera en somme que redoubler le discours dominant des médias et du show-biz ; on pourra de la sorte fabriquer en série des consommateurs de droit, intolérants, procéduriers et politiquement corrects, qui seront, par là même, aisément manipulables tout en présentant l’avantage non négligeable de pouvoir enrichir à l’occasion, selon l’exemple américain, les grands cabinets d’avocats.

    Naturellement, les objectifs ainsi assignés à ce qui restera de l’Ecole publique supposent, à plus ou moins long terme, une double transformation décisive. D’une part celle des enseignants, qui devront abandonner leur statut actuel de sujets supposés savoir afin d’endosser celui d’animateurs de différentes activité d’éveil ou transversales, de sorties pédagogiques ou de forums de discussion (conçus, cela va de soi, sur le modèles des talk-shows télévisés) ; animateurs qui seront préposés, par ailleurs, afin d’en rentabiliser l’usage, à diverses tâches matérielles ou d’accompagnement psychologique. D’autre part, celle de l’Ecole en lieu de vie, démocratique et joyeux, à la fois garderie citoyenne – dont l’animation des fêtes (anniversaire de l’abolition de l’esclavage, naissance de Victor Hugo, Halloween…) pourra avec profit être confiée aux associations les plus désireuses de s’impliquer – et espace libéralement ouvert à tous les représentants de la cité (militants associatifs, militaires en retraite, chefs d’entreprise, jongleurs ou cracheurs de feu, etc.) comme à toutes les marchandises technologiques ou culturelles que les grandes firmes, devenues désormais partenaires explicités de « l’acte éducatif », jugeront excellents de vendre aux différents participants. Je pense qu’on aura également l’idée de placer, à l’entrée de ce grand parc d’attractions scolaires, quelques dispositifs électroniques très simples, chargés de détecter l’éventuelle présence d’objets métalliques.

     

    Jean-Claude Michéa, L’Enseignement de l’ignorance et ses conditions modernes.

  • Croupir

    On ne peut pas dire que je surestime le théâtre de mon époque ; il arrive donc qu’on me demande pourquoi je n’écris pas des romans…

     

    Je ne m’intéresse presque plus aux actualités, aux nouvelles, aux informations, aux médias ; ils passent quand même. Le monde ne bruit pas d’autre chose.

    Au vu du français qu’on enseigne à l’école, et des livres que publient de sinistres coteries parisiennes, il faut admettre que lire ce qui paraît ne doit plus avoir pour quiconque d’un peu intelligent la moindre espèce d’intérêt.

    Ne pas lire peut aussi être un acte critique. 

     

    (La seule chose, généralement ignorée dans les campagnes, qu’on peut finalement apprendre de Saint-Germain-des-Prés, et qui a également l’immense avantage de dispenser de s’y rendre, c’est que le mot pré peut avoir pour adjectif pratin.)

     

    Lire un roman, désormais, c’est tolérer une manière de journalisme amateur qui ne prétendrait même pas, alors que cela seulement pourrait être un peu drôle, dire quelque chose d’important (– Alors, tu la craches, ta gavalda ?) ; ou inversement, qui prétendrait tellement à la révélation, au sens journalistique, d’importance, qu’il en deviendrait aussitôt stupide de boursouflures (Dan Brown, par exemple).

    J’attends donc la sortie, je ne sais quand, du prochain roman de Houellebecq.

     

    De toute façon, on est bons pour le cinéma et, bêtise pour bêtise, personne d’un peu sensé ne fait même plus mine d’en attendre quoi que ce soit d’un peu intelligent.

     

    Adios.