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Politique - Page 19

  • Position politique

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    Le misérable théâtre de notre époque ne s’aventure que rarement à représenter le pouvoir et les hommes qui l’exercent.

     

    Le théâtre est politique quand il représente le pouvoir ; pas quand il exprime les opinions personnelles de l’auteur.

    Sophocle a occupé de hautes fonctions politiques. Les historiens, partant de ses pièces, sont incapables de comprendre quelles étaient ses idées. Le fait est qu’écrivant du théâtre, il se situait au-dessus de celles-ci mêmes.

     

    Représenter le pouvoir tient en la description la plus active et impartiale possible des forces historiques en conflit – et par cette dernière expression je n’entends pas les dernières fadaises politiciennes ou sociétales – deux barbarismes – à la mode dans la bouillie journaliste.

    Cela seulement peut dire la hauteur ou la bassesse d’une époque, et conséquemment l’exalter ou lui nuire.

     

    Voilà bien pourquoi tout ce qui, dans la culture, n’est pas réellement théâtral reçoit aujourd’hui les plus vifs encouragements.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    (Voir aussi : Note de travail (2))

     

     

     

  • Opinions sur rue

    Crayon-trottoir. C’est une enquête réalisée dans la rue sur un échantillon de population approximativement représentatif de lui-même.

     

    – Bonjour, monsieur. Puis-je vous poser quelques questions ?

    – Quoi t’est-ce qu’on gagne ?

    – Un morceau de gloire relative en kit à monter soi-même.

    – C’est pas trop long alors, j’espère, parce que j’ai encore des courses à faire pour le chat…

    – Non, non, c’est très court. C’est une enquête anonyme pour savoir où on est avec la mort.

    – Ça a l’air intello, vot’ truc, là, dites, non, hein ?

    – Meuh non… Bon, vous y êtes ? Première question : Etes-vous prêt à mourir pour Dieu ?

    – Ah bah c’te blague, Dieu… Pff… Vraiment, hein.

    – 2. Etes-vous prêt à mourir pour votre pays / patrie / nation (rayez les mentions pas choisies ou pas comprises) ?

    – Vous déconnez pas un peu, non ?

    – 3. Pour de l’argent ?

    – Ah oué oué oué… Bah non merde, parce que comment qu’on le claque après ?

    – 4. Pour vos parents ?

    – De toute façon, ’vont bientôt crever, les vioques. Place aux jeunes ! Même qu’on peut les aider à se magner un peu grâce à la dignité. C’est qu’y a le pavillon à récupérer…

    – 5. Pour vos enfants ?

    – Euh… Ça dépend : c’est filmé ?

     

    Résultat de l’enquête :

    Probant.

    L’échantillon est tout à fait émancipé, libéré de toute emprise libérale, idéologique ou religieuse.

    Son désir légitime d’être filmé nous conduit à lui proposer de pratiquer quelques activités artistiques citoyennes ouvertes à tous.

     

    Morale – car c’en est une :

    Mourir pour rien

    C’est vachement bien

    De toute façon on va crever

    Autant que ça soye pour rien

     

    – Et sinon, monsieur, je peux vous demander ce que vous faites dans la vie ?

    – Je m’emmerde.

    – Non mais, comme métier ?

    – Chui assistante sociale bac +5, pourquoi ?

     

     

     

  • Reconnaissance

    Il y a quinze ans. Il est une heure du matin dans le bar du théâtre, peut-être deux. Elle a quarante ans environ, soyons galant, elle est une actrice très connue dans le milieu, elle est ici en tournée, je ne suis rien. Elle parle à un autre homme, coule vers moi des regards appuyés. J’essaie de faire durer ma bière, je suis fauché. Elle remet une tournée. La conversation reprend entre eux deux, politique, pognon, théâtre, je fume en silence les clopes de l’autre. Lequel, plus malin que moi, bientôt nous quitte. Je serais volontiers parti avec lui car il a une auto, mais je n’ai pas fini ma nouvelle bière. Je ne sais pas quoi lui dire, à cette femme. Le silence, heureusement, ne dure pas. Elle allonge son bras sur la table, pose sa main avec bracelet sur la mienne. – Tu veux passer à mon hôtel ? Je la regarde, ne sais d’abord que dire, puis pose mon autre main sur la sienne et souffle : – Vous savez, je n’aime pas assez le pouvoir… Et je me lève. Et je sors. Et une fois dehors, je rigole. Mais je rigole. – Mes gages, mes gages, mes gages ! glapit à la fin Sganarelle. Je ne lui eusse pas même été Elvire, à cette brave femme. Plutôt Charlotte ou Mathurine. Ce qui, notez-le, n’est, pas davantage mon genre. Le lendemain soir, j’ai cru qu’elle me faisait la gueule ; mais aujourd’hui, je crois plutôt qu’elle ne me reconnaissait vraiment pas. Pas pris, pas vu. Le surlendemain, mon camarade Z, la mine décavée, me remercia. Il devait obtenir, quelques mois plus tard, je ne sais quel petit rôle sans intérêt dans un pièce du même tonneau et subir sans regimber, dans le temps des répétitions, bien des humiliations. Il aurait bien mieux fait d’aller aux putes. Et de lâcher quelques biftons.

     

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    Nota: La couverture de ce Folio est immonde.