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verbe - Page 2

  • Verbes anciens

    D’abord deux anecdotes, d’ampleurs diverses certes, mais d’une convergence certaine…

     

    1. Le PDG du Bronzeculand France, première puissance touristique planétaire (tremblez, mortels !), un dénommé Mickey Grenelle, époux d’une chanteuse comique (aphone ?), a annoncé, il y a quelque temps déjà, sa volonté de faire disparaître la publicité des chaînes de télévision du service public, dans le but, croit-il – à moins qu’il ne feigne (du verbe feindre), car le bonhomme est roué –, d’améliorer la qualité des émissions.

    C’est tout bonnement crétin.

    Cet homme ne dispose d’aucun moyen concret, institutionnel ou intellectuel, permettant de relever le niveau, effectivement extrêmement bas, des émissions télévisuelles, de service public ou pas.

    Pourquoi ? Parce que le seul moyen de faire une chose pareille demanderait un programme sur cinquante ou soixante ans ; c’est-à-dire sur un temps correspondant à deux générations. Or, le personnel touristico-pipolitique, dans notre belle démocratie à plan quinquenno-électoral intégré, ne dispose pas des moyens, institutionnels et intellectuels, de penser à cette distance.

    C’est en somme ce qui nous différencie des autocraties (pensons à l’URSS hier, à la Chine aujourd’hui) ; et pour cette fois du moins, il n’y a aucune gloire à tirer d’une telle différence.

    Mais surtout parce que le seul moyen concret de relever le niveau, à la télévision comme ailleurs, tient à la transmission des connaissances, c’est-à-dire, pour l’heure, à ce qu’on appelle encore, par ironie ou par simple oxymore, je ne sais, l’Education Nationale (laquelle sous ce nom ou sous le précédent fut quelque temps la colonne vertébrale de la République).

    Le seul moyen de relever le niveau est d’ « élever », au sens propre, je veux dire : d’élever au-dessus de soi, la génération qui vient. Or nous sommes, et ce n’est rien de le dire, sur la « pente descendante ».

    La suppression des publicités, si connes soient-elles, et elles le sont d’évidence, n’y changera rien du tout. Cela ne fera rien (sauf sans doute faire monter le prix de la seconde de pub sur les chaînes privées, ce qui est peut-être le but, à moins que ce ne soit un « bénéfice secondaire », comme disent parfois nos amis les psys qui sont, eux, comme chacun sait depuis Freud, économistes jusque dans la libido. Un autre de ces « bénéfices » pourrait être l’intrusion, discrète d’abord, puis affichée, des publicités dans les émissions mêmes, ce qui, me souffle-t-on, est déjà fait, celles-ci ne servant plus guère qu’à assurer la « promotion » de bidules idiots et autres machins stupides : sérieusement, il ne fait que ça, Ruquier, par exemple).

    En attendant, ce sont les fournisseurs d’accès aux technologies internet qui seront taxés pour compenser le manque-à-gagner dudit service public; lesquels, en bonne logique ou à peu près, répercuteront la taxe, sinon plus, sur leur clientèle.

    Bref, cette question de la qualité évacuée, la chose se résume ainsi : Blague et redevance à part, nous regardions gratuitement des pubs, il nous faudra payer pour ne plus les voir. A moins, bien sûr, que nous ne changions de chaîne…

     

    2. « Le maux de tête lui arracha quelques plaines. »

    Le maux de tête. Parfaitement. Et quelques plaines.

    Non, non, ce n’est pas du surréalisme. Ou plutôt si, c’en est. Du plus moisi. Du surréalisme d’institution, bien sûr. Pour ne pas dire d’Etat.

    J’ai moi-même construit cette phrase débile en m’appuyant sur les dernières avancées du pédagogisme de pointe.

    Car, voyez-vous, j’ai lu récemment, dans ce qu’on appelle le Cahier de liaison d’une petite fille de CP, ce mot révolutionnaire signé d’un professeur des écoles qui part en retraite à Noël, lequel professeur se trouve être une dame (ce qui n’a rien à voir en soi, mais c’était juste pour le plaisir d’écrire le mot professeur au masculin quand même) :

    « XXX s’est plain d’un maux de tête. »

    Je n’aurais, je crois, poussé qu’un léger soupir si j’avais lu que la petite XXX s’était « plainte d’un mal de tête » ; j’aurais peut-être grommelé quand même un « au point où on en est… », et serais passé à autre chose.

    Mais le cumul m’a tout bonnement sidéré. Et je suis resté coi. Sidéré. Scié, quoi.

    Bref, on peut retirer les pubs tant qu’on veut, avec des gens de cette qualité-là pour opérer la transmission des connaissances, si vous voulez mon humble avis, on n’est pas arrivé…

    On ferait mieux de retirer carrément toutes les émissions.

    Voilà pour les anecdotes.

     

    J’ai donc décidé ce soir d’écrire ce billet pour me venger. Ce qui est inutile autant qu’idiot, je le sais bien. Je vais le faire tout de même, en tentant d’être positif (si, si). Et de finir ce billet par quelque chose, pour autant que j’en sois capable, de beau.

    Après tout le beau, comme le vrai, d’ailleurs, n’a pas de verbe.

    On ne beaute pas.

    Pas davantage on ne vérite ni ne vraite.

    Le bien, lui, dispose d’un verbe (mais si, voyons, faites un effort).

    On bénit.

    Ce qui ne fait pas tant laïque (quoique la République ne manque pas, ces temps-ci, de culs-bénis, justement).

    Je vais donc vous entretenir, brièvement, de deux verbes anciens.

     

    La souffrance a un verbe, mais pas la douleur.

    La douleur l’a perdu (a-t-elle eu la douleur de le perdre ?).

    C’était le verbe se douloir.

    Lequel se conjuguait comme vouloir ou pouvoir.

    Ce qui faisait donc, au présent de l’indicatif :

    Je me deux,

    Tu te deux,

    Il se deut…

    Ce qui est assez beau, je trouve.

    Après que le verbe se douloir a disparu, et avec lui son limpide je me deux, il n’est plus resté qu’aux psychiatres, pour compenser (et parfois décompenser), d’inventer la schizophrénie.

     

    L’autre est le verbe faillir, qui n’a certes pas disparu tout entier, mais dont une grande part de la conjugaison, même aux temps les plus simples, a sombré.

    (J’écris ces lignes alors que, si l’on en croit les gens qui le disent, la faillite nous guette.)

    Il faisait au présent de l’indicatif :

    Je faux,

    Tu faux,

    Il faut…

    Troisième personne du singulier recoupant exactement celle du verbe falloir.

    J’y vois comme la marque d’une fatalité…

     

    Je ne vérite ni ne vraite.

    Mais je faux.