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Sevrage

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– Profession ?

– Poète, répondit Ivan, sans savoir pourquoi, à contrecœur.

L’inconnu parut navré.

– Ah ! Je n’ai vraiment pas de chance ! s’écria-t-il, mais il se reprit aussitôt, s’excusa, et demanda : Et quel est votre nom ?

– Biezdomny.

– Hé ! hé ! ricana l’autre avec une grimace.

– Eh bien quoi, mes vers ne vous plaisent pas ? demanda Ivan avec curiosité.

– Ils me font horreur.

– Et lesquels avez-vous lus ?

– Mais je n’ai jamais lu aucun vers de vous ! s’exclama nerveusement le visiteur.

– Alors, comment pouvez-vous dire… ?

– Mais enfin, qu’est-ce que c’est que ça ? dit l’inconnu. Comme si je n’en avais pas lu d’autres (1). D’ailleurs, qu’est-ce que c’est… des merveilles ? Bon, je suis prêt à vous croire sur parole. Vos vers sont bons, allez-vous me dire ?

– Ils sont monstrueux ! dit abruptement Ivan, avec courage et sincérité.

– N’écrivez plus ! implora le visiteur.

– C’est promis, juré ! répondit Ivan, solennel.

Cette promesse fut scellée d’une poignée de main, mais à ce moment on entendit des pas légers et des voix étouffées dans le couloir.

 

 

(1)          Commentaire malicieux de la situation littéraire des années 30 qui voient la multiplication d’œuvres de commande, stéréotypées, toutes semblables dans leur platitude. [Note du traducteur (Claude Ligny) ou de l’éditeur (Marianne Gourg)]

 

Boulgakov, Le Maître et Marguerite

Extrait du chapitre XIII de la Première Partie, au tout début de cette première apparition du Maître.

 

 


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