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Matin

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Au réveil parfois, peut-être après quelque cauchemar déjà bien oublié, il regrettait de n’avoir pas été plus médiocre ; il lui semblait alors qu’une médiocrité plus grande, ou simplement plus commune, et des exigences moindres vis-à-vis de lui-même lui eussent davantage permis ce que les autres appelaient une réussite sociale… et alors il rêvait à ces métiers qu’il aurait pu tranquillement exercer, comme s’ils étaient simples, de facteur jusqu’à politicien, le médian de la médiocrité enviable lui semblant culminer, si j’ose dire, dans la profession de journaliste. Etait-ce ou non lucide, je ne sais, mais il lui semblait que des exigences moindres l’eussent mené à la médiocrité commune, assortie au moins de la reconnaissance de quelques-uns des innombrables pairs qu’alors il eût eu, plutôt qu’à la sienne seule, trop isolée à son goût… Il lui paraissait s’être croisé pour une chimère, à laquelle il pouvait toutefois – mais seulement – donner son nom ; et c’était assurément trop d’exigences pour une médiocrité qui ne différait de celle des autres, peut-être, qu’en cela qu’elle ne recevait plus du monde aucune approbation dès que lui-même, dans ces moments difficiles, en venait à s’ôter la sienne propre.

Par bonheur, ces moments étaient rares et bientôt il déployait de nouveau son ordinaire de mensonges narcissiques, et partait promener dans le médiocre monde son désœuvrement supérieur et ce contentement de lui qu’une décence ultime assortissait d’une discrétion qui, pour le meilleur comme pour le pire, le laisserait inaperçu. L’écroulement guettait ce raté qui ne survivait encore que de ne pas se prendre tout à fait pour rien et se demandait parfois, dans ces réveils difficiles, si sa médiocrité n’était pas finalement, elle aussi, des plus communes.   

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