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Truc mauvais

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C’est assez amusant, d’écrire un truc vraiment mauvais. On ne peut peut-être rien faire de plus méchant. Ubu Roi, par exemple, est volontairement très mauvais. C’est pour cela que c’est un chef d’œuvre, sans doute. Et que la chose de Jarry la plus potache a éclipsé les mallarméennes autres, très littéraires, difficiles certes, mais difficiles pour pas grand-chose, ce qui est un comble. On ne fait rien de plus méchant que d’être mauvais exprès, peut-être, au sens où ces adjectifs-là sont synonymes. On est alors à mille lieux des mauvais livres, et des simplement pas mauvais ; à mille lieues du médiocre s’efforçant vers je ne sais quelle idée, même haute, qu’il a de la littérature, de ce qu’elle doit être. A mille lieues du format. De ce qu’il faut faire. De ce qu’on croit qu’il faut faire. Et pire, de ce qu’on croit qu’il faut dire. Ou ne pas dire. Ou prouver (alors qu’il n’y a rien à prouver). Toutes ces choses qu’on fait par rapport. Pour entrer. Pour avoir l’air, en somme. Tous ces bouquins au final qui ne sont que des cartes de visite, pour entrer dans le monde mondain ou dans les gonzesses, peu importe. Cartes qu’il faut refaire ensuite au goût du jour, pour rester dans quoi on est entré, pour ne pas se faire sortir du loft (yeah). C’est déjà cuit. Non pas pour la farce littérature, chose morte, journalisme de standing, mais pour dire quoi que ce soit vraiment, par le coup de poing dans les balloches à la Jarry ou par la très haute poésie à la française, à la Proust. Ça va être assez difficile à entendre, mais Shakespeare et Dostoïevski ne manquent pas du tout d’endroits où ils sont extraordinairement mauvais, vraiment méchants, à cogner fort et bas, et une part de leur beauté tient sans doute à cela. Tout l’entre-deux qui cherche quoi dire, qui se demande comment on peut se placer, avant-gardistes et imitateurs des anciens même combat, vous comprenez on est au XXIème siècle tout de même, la messe est dite hin hin et il n’y a pas moyen de ne pas tartiner son cul sur la page, soyons inrockuptibles et musiquons à la mords-moi-le-nœud. Les prétentions mondaines voudraient péter plus haut que ce cul dont elles ont haute idée, certes (et de quoi d’autre, étant ce qu’elles sont, pourraient-elles avoir haute idée ?). Elles auront seulement pété, au mieux laissé quelques traces dans des bouquins qui, tout de même, Dieu merci, n’intéresseront plus personne dans les trois jours, au mieux trois mois. Ça ne sent pas du tout la chair, mais la merde. Et voilà encore Amandine Néssouzyx, angot de sous-préfecture récemment parvenue à Parmerde, qui nous raconte comment elle se fait chier même par tous les trous bourrée. Passons. Moi-même qui vous cause, j’ai retrouvé dans ma bibliothèque quelques slips sales oubliés là, des sollers – le seul écrivain convaincu d’avoir gagné sa guerre du kitsch, d’avoir par la grâce de son intercession formidable kitschisé tout ce qui n’était pas initialement kitsch –, un béhachel ronflant qu’on m’a probablement offert, cinq barthes simpson, quatre mille douze beigbeders et assimilés, du vent, du vent, des vents. Tout de même pas d’onfray comme un gardon congelé ni de dantzig pour mourir. A la poubelle sous la neige tout ça ! Car tout ça est juste mauvais, et pas pour un denier méchant – je cause là des livres, hein, pas des kilos d’ordureries sociales variées, c’est la vie, qu’il a fallu contorsionner pour enfin fourguer la moraline au chaland alphabétisé (d’après lui-même, du moins) –, c’est également à des années-lumière de toute beauté. C’est tiède, c’est mou, chargé à blancs, ça se défile, ça veut juste vendre, le rêve de l’île de Ré, des minets, des minets, oui, mais décoiffants, décoiffés... Au bout de la chaîne, dans la télé où l’on se looke, ces fouille-merdes payés pour ça causent déontologie avec des airs d’aristocrates fin de race, car il faut voir comment les parvenus imitent ce qu’ils peuvent, les pauvres, et se la pètent d’emblée fin de race, avec un air usé (de n’avoir rien fait) tout à fait fabriqué, et dans cette fabrication-là pourtant il y a toute la vérité dont ils sont finalement capables et qu’ils ne soupçonnent pas. Ils sont juste mauvais, oui, ces auteurs, mais pas méchants, fac-similés d’armes, modèles de collection, répliques – des faux, quoi. Bref. C’est amusant, disais-je, d’écrire un truc vraiment mauvais. Ce que j’essaie par ailleurs. Je voulais vous en parler, mais je renonce. C’est tout le billet de ce soir (bonsoir) qu’est parti en sucette, ça délasse. Et puis, vous savez quoi, je crois que tout ça n’a vraiment plus aucune importance. Je me contrefous assez de passer pour un con et j’aurai toujours l’air d’un foutu prolo pour des minets ; on m’a demandé l’autre jour qui était le plus grand écrivain français, j’ai répondu Molière, on m’a regardé comme si j’étais débile léger, esprit scolaire (mon cul). Tant mieux. D’ailleurs, je suis débile léger. Je n’ai jamais rien compris. J’abandonne.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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