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philosophie - Page 2

  • Après la fermeture

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    « La mort naturelle de l’Esprit d’un peuple peut se manifester par la nullité politique. C’est ce que nous appelons l’habitude. (…) Peuples et individus meurent ainsi de leur mort naturelle. Les peuples continuent à durer, leur existence est sans intérêt, sans vie. Celle-ci n’a plus besoin de ses institutions parce que ce besoin a été satisfait. Elle n’est que nullité politique et ennui. La négativité n’apparaît plus comme lutte interne, combat. (…) Dans une telle mort, un peuple peut se sentir fort à son aise, bien qu’il soit sorti de la vie de l’Idée. »

     

    Hegel, La Raison dans l’Histoire.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Ubicumque lingua romana, ibi Roma.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    hop 

     

     

     

  • Metaphysica

     

     

     

      

     

     

     

    Leibniz ni Heidegger. Le père ne s’énerve pas. Sa femme est en mission secrète avec Lacan (coyote) dans quelque ville idiote, Paris par exemple. Le bébé a la diarrhée, une otite, de la fièvre, une bronchiolite et des médocs à la con ; il n’a pas d’appétit et braille la nuit. Le père est calme. Il a de la chiasse sur les doigts. Ça vient de ce qu’il change le bébé, sans doute. Le bébé rigole sur la table à langer, et rigolant, gesticule. C’est très drôle, en effet, mon p’tiot gars. Le père avec du coton tartiné de crème trucmachin tamponne le cul. D’une main, le bébé tripote innocemment son zizi. Le père dit : – Oui, oui, pourquoi y a-t-il quelque chose et non pas plutôt rien ? Puis il s’en lave pilatiquement les mains.

     

     

     

     

     

     

     

  • L'enseignement de l'ignorance

    Les constats éclairés de Jean-Claude Michéa seraient pour le moins désespérants, si tout hélas ne portait à les justifier – et je tiens qu’il faut tenter de ne pas désespérer de la réalité, tout espoir, catastrophe incluse, ne pouvant malgré tout venir que d’elle –, et s’ils ne se trouvaient présentés dans des livres dont je dirais qu’ils sont rafraîchissants d’intelligence ; car c’est une consolation de savoir qu’il se trouve encore en ce pays en proie au plus grand sinistre de son histoire, sinon pas : en proie au sinistre de son histoire même, quelques esprits capables de nous donner, des maux dont nous souffrons, une explication raisonnable, étayée par des faits vérifiables, dans une syntaxe impeccable (1).

    Aussi, étant sur tant de points bien au-dessous de cet auteur, n’entreprendrai-je pas une critique du livre qui m’intéresse ce jour, L’enseignement de l’ignorance, mais me contenterai-je de recopier le chapitre V de ce livre, que je m’autorise au surplus à débarrasser de ses notes, au demeurant fort intéressantes :

     

    A présent qu’il s’efface de nos vies, et bientôt de nos mémoires, nous comprenons un peu mieux ce qu’était vraiment le monde moderne jusqu’à une date récente. Ce qui faisait sa complexité effective, au-delà des simplifications rituelles de l’idéologie, c’était justement cette contradiction permanente entre les règles universelles du capitalisme et la civilité particulière des différentes sociétés où sa construction était expérimentée.

    C’était donc un monde où le « mode de production capitaliste » était bien loin de régner en maître. Tout autour de lui, en effet, subsistait un vaste ensemble de conditions écologiques, anthropologiques et morales, où, sans doute, le pire pouvait côtoyer le meilleur, mais dont on s’aperçoit, rétrospectivement, que si elles avaient rendu possible un degré déjà élevé de production capitaliste, c’était dans la mesure même où, selon des modalités diverses, elles permettaient d’en limiter ou d’en amortir les effets les plus dévastateurs. C’est, avant tout, ce dispositif historique compliqué qui rend intelligible l’ambiguïté constitutive de la plupart des institutions du temps, à commencer par l’Ecole républicaine, elle-même.

    Une fonction décisive de cette dernière était déjà, bien sûr, de soumettre la jeunesse aux contraintes de l’Ordre Nouveau, c’est-à-dire au règne naissant de l’universalité marchande et de ses conditions techniques et scientifiques. En témoigne, entre mille exemples, le combat obstiné mené par l’Ecole laïque contre les « patois » et contre diverses traditions populaires ou locales qui, d’un point de vue capitaliste, sont toujours, par définition, archaïques et irrationnelles. C’était également un lieu – où cette fois pour des raisons tenant, essentiellement, aux lointaines origines historiques de l’institution – s’exerçaient encore trop souvent des formes de discipline, de surveillance et de contrôle autoritaire, à coup sûr incompatibles avec ce qu’exige la dignité des individus modernes. Mais, en même temps, cette Ecole républicaine se souciait réellement – et sans doute, avec beaucoup de sincérité – de transmettre un certain nombre de savoirs, de vertus et d’attitudes qui étaient en eux-mêmes parfaitement indépendants de l’ordre capitaliste. On aurait le plus grand mal, par exemple, à déduire la décision d’enseigner le latin, le grec, la littérature ou la philosophie, des contraintes particulières de l’accumulation du Capital. En réalité, chacun voit bien qu’une culture classique réellement maîtrisée, nourrie, par exemple, des modèles du courage antique ou des chefs-d’œuvre de l’intelligence critique universelle, avait au moins autant de chances de former des Marc Bloch ou des Jean Cavaillès, que des spectateurs sans curiosité intellectuelle ou des consommateur disposés à collaborer sur tous les modes au règne séduisant de la marchandise.

    C’est ce fragile compromis historique, sur lequel reposaient, tant bien que mal, les différentes sociétés modernes, qui s’est trouvé progressivement brisé, au cours des inoubliables années soixante.

     

    A suivre…

     

    (1) Signe de temps, je me demande en revanche comment et si ma phrase tient debout.

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  • Du Jour des Morts comme point de départ...

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    De profundis clamavi ad te, Domine : Domine exaudi vocem meam.

     

    *

     

    Théâtre.

     

    La tragédie a basculé tout entière dans la comédie.

    Laquelle, considérablement surchargée, s’est effondrée sur elle-même.

    Restent ces ruines d’époques mêlées, qu’on industrie à tout va, pour personne, et que ça se vende ou pas.

     

    Alors ? Alors il y a ce qui, aujourd’hui, d’une façon ou d’une autre, est interdit :

    La farce aristophanienne, c’est-à-dire le pamphlet le plus violent.

    Le mystère médiéval, tout à réinventer.

    Deux choses peu solubles dans le cinéma, et tant mieux.

     

    J’appelle ça faire le point (au moins le mien).

    Whisky. Clope.

     

    *

     

    En guise de dessert, ce passage de Bloy, auquel ma note, étrangement, m’a fait songer :

     

    Laissez-moi donc tranquille ! criait-il à Clotilde, qui ne le tourmentait guère, pourtant, il n’y a que deux philosophies, si l’on tient absolument à ce mot ignoble : la spéculative chrétienne, c’est-à-dire la théologie du Pape, et la torcheculative. L’une pour le midi, l’autre pour le nord.

    Léon Bloy, La femme pauvre

     

     

     

     

     

     

  • Technique monstre

    Quelles sont les racines qui plongent plus profond que les racines politiques ? Qu’est-ce qui a rendu possible le « monstrueux » ?

    La première réponse à cette question semble banale. Effectivement, elle énonce : c’est le fait que nous sommes devenus, quel que soit le pays industriel dans lequel nous vivons et son étiquette politique, les créatures d’un monde de la technique.

    Comprenez-moi bien. En elle-même, notre capacité de produire en très grandes quantités, de construire des machines et de les mettre à notre service, de construire des installations, d’organiser des administrations et de coordonner des organisations, etc., n’est nullement monstrueuse, mais grandiose. Comment et par quoi cela peut-il mener au « monstrueux » ?

    Réponse : du fait que notre monde, pourtant inventé et édifié par nous, est devenu si énorme, de par le triomphe de la technique, qu’il a cessé, en un sens psychologiquement vérifiable, d’être encore réellement nôtre. Qu’il est devenu trop pour nous. Et que signifie cela maintenant ?

    Tout d’abord, que ce que nous pouvons faire désormais (et ce que nous faisons donc effectivement), est plus grand que ce dont nous pouvons nous faire une image ; qu’entre notre capacité de fabrication et notre capacité de représentation un fossé s’est ouvert, qui va s’élargissant de jour en jour ; que notre capacité de fabrication – aucune limite n’étant imposée à l’accroissement des performances techniques – est sans bornes, que notre capacité de représentation est limitée de par sa nature. En termes plus simples : que les objets que nous sommes habitués à produire à l’aide d’une technique impossible à endiguer, et les effets que nous sommes capables de déclencher sont désormais si gigantesques et si écrasants que nous ne pouvons plus les concevoir, sans parler de les identifier comme étant nôtres. – Et, bien sûr, notre capacité de représentation n’est pas seulement dépassée par la grandeur démesurée de nos performances, mais aussi par la médiation illimitée de nos processus de travail. 

     

    Voilà. C’était Günther Anders, en 1964, dans Nous, fils d’Eichmann.