Samedi matin 22 novembre, par froid coupant, soleil ras et lumière hivernale magnifique, nous nous sommes rendus, mon automobile et moi, jusqu’au village d’Auxon, situé quelque part sur la route vallonnée entre Troyes et Auxerre, encore dans l’Aube, en Champagne, pas encore dans l’Yonne, en Bourgogne, ou moins administrativement, dans ce pays d’Othe dont les frontières se rient des napoléoniennes divisions. A côté de l’église de ce village, dans le petit parc la jouxtant, on trouve cette incongruité-là : un manège d’auto-tamponneuses, en parfait état de marche et fermé au public. Comme je me rendais en ce village, aussi improbable que cela puisse paraître, pour assister et participer à ce que ses organisateurs nomment, avec une pompe des plus naïves, un convent d’auteurs (dramatiques), on me posa cette embarrassante question, à laquelle j’avais deux heures pétantes pour « répondre » : « Que vient faire ce manège d’auto-tamponneuses fin novembre à Auxon ? ». Quoique je doute fortement de l’intérêt intrinsèque de l’exercice, m’y étant plié d’assez bonne grâce, Chablis aidant, je ne répugne pas à livrer ici ma prétendue « réponse ».
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Couple avec vue sur auto-tamponneuses
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Je ne vous le recommande pas
J’ai commencé de lire un livre épatant, impressionnant, formidable.
Beau.
Son titre est très connu, du moins longtemps le fut, mais il serait pour le moins délicat de faire lire même son début dans les collèges ou lycées de France.
(Les choses délicates sont sur le point d’être interdites, non ? Et plus encore peut-être les choses vénérables. Un extrait sera exceptionnel ; une mention orale, suffisante.)
Ses personnages, réels ou non, aussi sont célèbres, et même quelques objets.
Ce n’est pas de la littérature jeunesse comme disent les cochons ; pourtant, et à plusieurs titres, c’est de l’enfance en barre, ce bouquin. Des enfances, même.
Il ne fut pas écrit pour les enfants, pourtant. Mais pour les hommes.
(A mesure que l’adolescence s’étend en flaque commerciale obligée, l’enfance et l’âge d’homme s’amenuisent, en longueur évidemment, en profondeur surtout.)
C’est un livre abandonné aux techniciens – et il en faut.
C’est un livre à pleurer sur les beautés perdues.
Etant un porc, je ne l’avais jamais lu. Je vais le lire lentement.
Dans plusieurs traductions. Et dans le texte aussi.
Son auteur l’a signé, mais il est demeuré anonyme.