Soyons sybillin, c'est plus sûr.
Où la belle et douteuse tradition pamphlétaire tient que l’insulte est le recours ultime d’une pensée défaite – et c’est par là peut-être que le pamphlet ajoute à sa farce sans frein cette émotion qu’inspirent les perdants –, la tradition dramatique, au sens le plus large, tente de passer la censure de son temps (il y a toujours une censure) en s’accordant exprès à la débilité régnante et en faisant parler, même haut, dans un langage idiot et plat, ceux qu’elle renonce apparemment à insulter ; à son sommet, elle peut être admirée de ceux qu’elle singe et réputée servir. Cette ambiguïté, échec voulu et survie assurée, ne peut plus alors être perçue que par quelques esprits dégagés des contingences et n’aspirant pas à un quelconque pouvoir, même proche ; tandis qu’après son temps, le pamphlet ne semble plus fasciner que ceux qui eussent été insultés par lui et ceux qui, quand ils ne sont pas les mêmes, par lâcheté, s’en trouvent incapables.