Le roi a seize ans.
Seize ans et déjà l’État.
Comme d’une embuscade il porte son regard,
par-delà les vieillards qui l’entourent au conseil,
quelque part plus loin dans la salle
et peut-être ne sent-il rien d’autre
que le froid du collier de la Toison d’or
contre le menton long, étroit et dur.
L’arrêt de mort qu’il a devant lui
reste longtemps sans parafe.
Et eux imaginent ses tortures de conscience.
Le connaîtraient-il mieux, ils sauraient
qu’il ne fait que lentement compter jusqu’à soixante-dix
avant de signer.
Rainer Maria Rilke
Nouveaux poèmes, 1ère partie
traduction de Lorand Gaspar